Principale adjointe du collège de l’Étang-Saint-Paul, Catherine Lafosse n’ignore rien des subtilités du handball de l’île. Et si elle reconnaît certaines difficultés, elle devine aussi un léger vent d’optimisme.
Ce dernier matin de janvier, dans le complexe du Vercors, à quelques kilomètres de Valence, où elle a un temps officié, Catherine Lafosse était à deux doigts de rejoindre ses ouailles enjouées au centre du parquet pour s’immiscer dans la farandole. Le Pôle de la Réunion, tour à tour fessé par l’Occitanie (14-28), la Bretagne (16-24), l’Ile-de-France (13-30), les Hauts-de-France (11-28) et le Grand-Est (13-34) venait de décrocher un premier succès inespéré face à la Normandie (17-15), synonyme de 13e et avant-dernière place à ces Interpôles de Bourg-de-Péage. Synonyme, surtout d’un immense bonheur, celui des jeunes filles, de Stéphanie Lambert, la coach, une joie teintée de soulagement, de satisfaction, aussi, celle de ne jamais avoir baissé les bras en dépit d’une concurrence mieux apprêtée, mieux rodée.
Cathy Lafosse n’ignore rien des difficultés, ni même des préoccupations du handball de l’Ile de la Réunion, celui qui a offert aux équipes de France les Jackson Richardson, Patrick Cazal, Daniel Narcisse ou Leila Lejeune pour ne citer que ceux qui ont été champions du monde. Intervenante, au côté de Michel Etienne, au Pôle Espoir dès sa création, en 1996, elle a voué sa vie au handball, entraîné Leila Lejeune ou Stéphanie Lambert au FC Port, encadré, dirigé, entraîné encore et encore, sans jamais cessé de militer. Principale adjointe du collège de l’Etang-Saint-Paul, elle est aujourd’hui un membre influent de la Ligue, l’adjointe de Stéphanie Lambert qu’elle accompagne bien sûr sur le suivi scolaire, et depuis 2021 présidente du Conseil d’Administration du CREPS de Saint-Denis. « Il y a deux organisations complètement différentes à la Réunion, explique-t-elle. Les filles sont en lycée au Port, internes, avec des entraînements sur le site à côté. Les garçons, eux, sont au CREPS, en convention avec le lycée de Saint-Denis. »
Parmi les jeunes filles présentes dans la Drôme, certaines, peut-être, emboiteront le pas de Sonia Cendier ou Nathalie Selambarom, anciennes internationales elles aussi, mais les profils tardent à se dessiner. « Le handball a perdu un peu de vitesse, notamment chez les filles, concède Cathy Lafosse. Au-delà du Covid, il y a le fait que l’on s’est sans doute un peu endormi sur nos lauriers, alors que l’on a longtemps été dans l’innovation sur certaines choses. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Un exemple : On a toujours dit que dans les DOM, il y avait des qualités physiques. Mais on n’a jamais travaillé ces qualités physiques. Et on a été rattrapés. »

Isolés au coeur de l’Océan indien, les jeunes manquent aussi, évidemment, d’occasions de se confronter. Il y a bien la coupe des clubs champions de l’Océan Indien ou les Jeux des Îles (JIOI) tous les quatre ans, mais c’est très peu pour s’évaluer. Ces jeunes continuent néanmoins de profiter de la qualité de l’encadrement réunionnais pour intégrer les équipes de France. Les frères Gildas, Victor et Gaspard, Chamiri Riday, Amil Malicki, Noah Lenclume et Jérémy Robert ont été retenus ces dernières années. Théo Ducap, Valentin Barrabé, Tom Lafosse, Karim Bourahima ou Gauthier Ivah frapperont peut-être à la porte. Chez les filles, en plus d’Elisa Techer ou Camille Plante qui ont déjà posé quelques jalons, on retrouve des joueuses comme Jeanne Lejeune, la fille de Leila, qui s’est malheureusement blessée après un stage avec les U16, mais qui ne devrait pas tarder à réapparaître. Dans quelques jours, Kannel Bultor et Amélie Delgard seront, elles, avec les U18 à la Maison du Handball. « L’essaimage sur la zone avec Mayotte change la donne, reconnaît Cathy Lafosse. Depuis deux-trois ans, les meilleurs intègrent le Pôle. C’est un travail en collaboration, avec les sites d’Excellence à La Réunion, et les sites d’Accession à Mayotte, en filles en tout cas. »
Des motifs d’optimisme, donc. Que ne manque pas de souligner Cathy Lafosse : « Les Pôles ont vraiment fait basculer le handball à la Réunion. On est passé d’une pratique loisirs à une pratique modérée avec trois entraînements par semaine, ce qui été déjà énorme. Sur certaines années, on était même à quatre, avec des stages une fois par moi. Aujourd’hui, les résultats sont là, pas toujours visibles, mais ils sont là. Sans doute existe-t-il d’autres Jackson, d’autres Leila, mais il y en a aussi ailleurs, parce que l’on travaille correctement à peu près partout. »
La seule crainte de Cathy Lafosse, c’est la disparition de certains clubs féminins et pas seulement en Métropole (Bourg-de-Péage, Fleury-les-Aubrais) : « Le club de Saint-Gilles Les Hauts, avec ses quatre cents licenciés, a disparu. Le FC Port aussi. Il a fusionné avec le Port HC alors qu’il incarnait le handball féminin et la qualité de sa formation sur l’île. Le HP Saint-André, concurrent de la Cressonnière, n’est plus là non plus. C’est dommage parce que l’esprit club était aussi un des atouts de notre handball. »
Philippe Pailhoriès

FICHE TECHNIQUE
Président : Philippe Alexandrino
Responsable Pôle Espoir filles : Fred Valliamée / Stéphanie Lambert (entraîneur)
Responsable Pôle Espoir garçons : Fred Valliamée / Christian Chevalier (entraîneur)
Joueuses issues du territoire : Sonia Cendier, Stéphanie Lambert, Leila Lejeune, Camille Plante, Nathalie Selambarom et Elisa Techer.
Joueurs issus du territoire : Olivier Asoh, Patrick Cazal, Nicolas Claire, Louis Despreau, Gaspard et Victor Gildas, Gauthier Ivah, Benoit Kounkoud, Bernard Latchimy, Noah Lenclume, Jeffrey Mtima, Daniel Narcisse; Jackson Pavade, Fabrice Payet, Christophe Quive, Jackson Richardson et Jérémy Robert.