Dans exactement 19 semaines, s’ouvriront les Jeux de Paris 2024 et l’entrée en lice des équipes de France championnes olympiques en titre. Avec les 50 nuances de Jeux, nous désirons vous faire revivre, chaque semaine, les épopées de l’équipe de France au travers de huit olympiades, de Barcelone 92 avec la première médaille décrochée par les Bronzés de Daniel Costantini, jusqu’à Tokyo où les deux collectifs se sont parés d’or. Des histoires singulières, des anecdotes, des portraits, des coups d’arrêts aussi où pendant trois éditions (1996, 2000 et 2004), le handball français rongeait son frein pour mieux briller à Pékin et à Tokyo, en passant par Londres et Rio. 32e épisode avec « Voilà, c’est fini ».

ATLANTA 1996 – HOMMES
Voilà, c’est fini

C’est un matin triste et tiède, un matin pour oublier. Ressusciter. Dix jours plus tôt, dans le sillage entrainant de Grégory Anquetil et Guéric Kervadec, les Français avaient ouvert ces Jeux avec gourmandise (27-25), mais c’est l’âme en peine qu’ils retrouvent cette fois leurs amis espagnols dans un Georgia Dome déjà paré. L’enjeu est simple. Ravaler ses rancoeurs, faire corps pour glaner une deuxième médaille de bronze d’affilée. Simple et illusoire. « L’esprit n’y était plus depuis bien longtemps, rumine Frédéric Volle, et je savais déjà que ce groupe ne saurait pas trouver les ressources pour finir en beauté. »

Lorsque Per Elbrønd et Kjeld Løvqvist sifflent le coup d’envoi, l’espérance est encore vivace. Jusqu’à ce 0-6 fatal du début de seconde période, les Bleus résistent et profitent des largesses espagnoles. Iñaki Urdangarin est à 2/9 au tir ; Jesús Olalla à 3/8 ; Talant Dujshebaev à 3/12. Mais Stéphane Stoecklin (6/15) et Frédéric Volle (2/8), les bras armés de Daniel Costantini, ne trouvent pas la mire non plus.

Frédéric Volle, qui sera élu meilleur arrière gauche du tournoi quelques minutes plus tard, ne voulait pas être là. Il a trente ans. Depuis longtemps, il a pris la décision de mettre un terme à sa carrière internationale à l’issue de ces Jeux. « Ça ne se passait pas bien avec Daniel, se souvient-il, ça avait même été tendu dès la préparation. Je n’avais pas accepté le remaniement qu’il nous avait imposé. L’équipe n’a jamais su se trouver. On ne partageait rien. Je ne me sentais pas à ma place. »

Alors il songe à cette sortie de scène prématurée et sentencieuse. « Daniel m’avait demandé de réunir les joueurs pour leur parler, soupire-t-il, mais ce n’était pas à moi de recoller les morceaux. Je lui ai annoncé que j’arrêtais, que je ne jouerai pas ce match. Ça ne valait pas la peine, je n’avais plus envie. »

Le désordre est total. Le groupe disloqué. « Apparemment, poursuit Frédéric Volle, certains sont allés lui demander de me convaincre de jouer. J’ai joué. Mais j’étais là sans être là. Le cœur n’y était vraiment plus. Je n’aurais jamais dû succomber à la tentation. J’ai immédiatement regretté ma décision. »

A vingt-cinq secondes de la fin du temps règlementaire, cette équipe raccommodée recolle pourtant à un but (25-26). Mais elle n’a plus la force. La lucidité. Elle n’est plus vraiment une équipe. Demetrio Lozano plante l’ultime banderille dans le cou du taurillon chancelant. « C’est le pire souvenir de toute ma carrière, conclut Frédéric Volle. Mais malgré cet épisode, je suis content et fier d’avoir participé à l’élan du handball français. »