L’histoire remonte à 2005. Pour la première fois, une équipe de France jeune (la catégorie avant France junior) parvient à se qualifier pour une compétition internationale. Le championnat d’Europe a lieu en Autriche, et pour leur baptême, les Bleuettes affrontent la Croatie. « A la 24e minute de jeu, on est menées 9-0. Je marque le premier but de l’équipe en faisant une roucoulette, de l’aile, dans une position complètement déséquilibrée. C’est le déclic, et on finit par gagner le match ! » Allison Pineau raconte là un souvenir dont ses quatre coéquipières actuelles en France A parlent encore avec le même éclat dans les yeux. Cette génération 1988/1989 terminera l’Euro avec une médaille de bronze, la première pour cette catégorie d’âge, et se qualifiera l’année suivante pour le Mondial (4e), puis pour l’Euro junior en 2007 (5e) et enfin le Mondial junior en 2008 (7e). Les deux années juniors se feront sans Allison Pineau, surclassée en France A dès 2007, mais avec une joueuse née en 1990 et surclassée dans la catégorie : Claudine Mendy.?
Quatre années, quatre compétitions, et que de souvenirs? « C’est dans ces années-là qu’on a vécu les meilleurs moments, entre guillemets. On touche un peu au haut niveau, mais on est encore jeune. C’était sérieux sans vraiment l’être, on s’amusait quand même beaucoup », se souvient Marie-Paule Gnabouyou. « C’était un peu les années folles, renchérit Allison Pineau. On se marrait beaucoup, on faisait des bêtises, des petites crasses? On était en plein dans notre jeunesse. On a réussi à compenser à notre manière le fait de partir en stage et de ne pas avoir de vacances comme tout le monde. Tous les bons moments à prendre, on les a pris. » « Ca restera gravé, car c’est la première fois qu’on voyageait, et on vivait le truc à fond », enchaîne Blandine Dancette.??
Gnabouyou : « Les Danoises nous mettaient la misère »?
Elles sont cinq, et même six, en comptant Audrey Deroin, non retenue par Olivier Krumbholz pour cet Euro, à être aujourd’hui installées en équipe de France senior. Cinq sur seize, c’est beaucoup pour une seule génération, dans une équipe qui rassemble des joueuses de 20 (Bruneau) à 33 ans (Tervel). « Que cinq ? Je croyais qu’on était plus, fait pourtant mine de s’étonner Cléopâtre Darleux. Mais à cette époque, je ne pensais pas qu’on serait autant. Quand tu es jeune, tu regardes l’équipe de France avec de grands yeux, mais jamais de la vie tu te dis que tu vas y être plus tard. » Un avis que Marie-Paule Gnabouyou semble partager : « On pouvait imaginer le potentiel des filles déjà à cette époque, mais je ne m’inclus pas dedans ! Je ne pensais pas en faire partie, et à l’inverse, il y avait des très bonnes joueuses de cette équipe qui ne sont plus là aujourd’hui. Le chemin est long. En arrivant en France A, j’ai d’ailleurs été totalement dépaysée, j’ai eu l’impression de n’avoir jamais vu le haut niveau. »?
Le club des cinq a donc grandi ensemble dans les différentes équipes de France. « On se connaît depuis l’âge de quinze ans. Cela crée des affinités, mais aussi des prises de tête !, explique Julie Goïorani. Mais les relations ne sont plus les mêmes aujourd’hui, chacune a grandi et n’a plus le même caractère que lorsqu’elle était gamine. » « Notre septième place à la dernière compétition était d’ailleurs due aux nombreux différends dans l’équipe, reprend Blandine Dancette. On a plusieurs fois loupé le coche, mais on n’a jamais été à la ramasse non plus, en terminant au pire septièmes, ce qui prouve qu’on avait quand même une très bonne génération »? Allison Pineau avoue reparler souvent de cette époque avec ses copines. Le match d’aujourd’hui devrait rafraîchir encore plus leurs souvenirs. Après les JO de Londres, l’été dernier, le sélectionneur du Danemark Jan Pytlick a décidé de faire le ménage et de confier les clés de l’équipe nationale à cette même génération 88/89. Sur les quatre compétitions disputées entre 2005 et 2008 par cette catégorie d’âge, le Danemark en a remporté trois avant de conclure par une deuxième place au Mondial junior? Les six Danoises qui étaient de la partie et qui joueront ce soir sont presque toutes dans le sept majeur de l’actuel Danemark (Toft, Kristiansen, Thorsgaard, Lyksborg, Augustesen et la capitaine Line Jørgensen). « Elles ont tout gagné en jeunes, elles nous mettaient la misère, et je peux vous assurer qu’elles jouent exactement de la même façon aujourd’hui en A ! Elles pratiquent ce jeu-là depuis dix ans », certifie Marie-Paule Gnabouyou. Mais ces jeunes Danoises ont également montré, mardi soir face à la Suède, que leur manque d’expérience était patent, en laissant filer un match qu’elles avaient pourtant dominé. Une victoire des Femmes de Défis, ce soir, serait une belle revanche sur le passé pour les cinq tricolores !