Pascal Person, entraîneur de l‘équipe de France U17 est l’invité de l’Entretien du Lundi, 48h après que ses joueurs soient montés sur la 3e marche du podium de la 14e édition du Championnat méditerranéen (ou Mondialito).

Avec cette médaille de bronze, l’équipe de France a t’elle optimisé son parcours ?
Il y a une forme de logique car avec cette génération nous n’avons jamais battu les deux équipes qui nous devancent, l’Allemagne et l’Espagne. Lors des dernières confrontations, au début de l’été, nous étions à -8 face aux Allemands, et à -13 avec l’Espagne. J’ai revu les matches à la vidéo et j’estime que nous avons progressé dans nos compétences technicos-tactiques ainsi que dans la dimension mentale qui nous manquait. Derrière ces deux équipes auxquelles j’associe le Danemark, l’équipe de France se situe dans un 2e niveau.

L’organisation mise en place par Alain Koubi et Alain Dessertenne était du premier niveau…
C’était en effet d’une grande précision avec les mêmes rythmes et us que sur une grande compétition internationale. L’hébergement et la restauration étaient très convenables ainsi que la logistique générale et les déplacements. C’était tout à fait remarquable de jouer dans des salles pleines en après-midi et en soirée.

Disputer cette épreuve en France, jouer à l’AccorHotels Aréna la phase finale : était-ce un investissement d’avenir pour les jeunes ?
Au travers la catégorie U17, la volonté de la Direction Technique Nationale masculine est de détecter les potentiels et de les accompagner dans les grandes compétitions internationales pour les faire grandir. Il s’agit de former les joueurs individuellement et de construire l’équipe qui sera ensuite conduite par Éric Quintin et Yohann Delattre. Pour cette génération 2000-2001 et ses joueurs à maturité plus longue, il faudra être beaucoup plus patient et faire preuve de plus de pédagogie dans les apprentissages qu’avec les deux générations précédentes.

A court terme, quelle est l’ambition de cette équipe ?
Je l’ai évoqué avec les garçons lors de notre réunion de clôture. Notre objectif sera d’atteindre le carré final lors du FOJE organisé l’été prochain en Hongrie. Huit équipes disputeront la compétition : en plus de la Hongrie, il y aura la Slovénie, la Croatie, le Danemark, l’Islande, l’Allemagne et l’Espagne. Notre équipe se situe plutôt dans le 2e groupe mais je suis persuadé que nous avons la possibilité de contrecarrer le projet de jeu espagnol et allemand.

Quelle génération fut la plus forte et la plus intéressante à coacher en U17 ?
Je suis en poste depuis 2006 et la génération des Accambray, Barachet, Dipanda. Incontestablement, c’est la génération 96-97 (Fabregas, Kounkoud, Richardson, Mem, Lenne…), qui m’a fait le plus progresser. J’ai dû modifier mon management des joueurs et de l’équipe. Cela correspond aussi au moment où j’ai commencé à travailler avec un psychologue du sport, Mackis Chamalidis. L’idée générale est qu’on ne peut pas lutter contre l’innée et qu’il faut construire à partir des qualités intrinsèques de l’individu.

Cette démarche pédagogique est-elle déclinable sur chacune des générations ?
Une démarche pédagogique s’enrichit avec les individus. Le fondement théorique est basé sur la responsabilité. Avec les 96-97, nous avions entrepris de partager et d’additionner le projet de jeu individuel et le projet de jeu collectif. L’aboutissement, en terme de management, a été réalisé avec la génération suivante, les 98-99. En revanche, ce sera différent avec la génération 2000-2001 car il y a des joueurs avec des personnalités moins affirmées et qui sont moins outillés dans les savoir-faire techniques.

Quels ressorts as-tu utilisé pour optimiser la performance du groupe ?
Le noyau dur du groupe s’est beaucoup plus investi. J’ai senti plus de responsabilité par rapport à la réalisation de l’objectif. Le dernier match est le signe de cette démarche. Il a fallu exercer auprès des joueurs, un éveil de la vigilance. C’est une anecdote mais c’est par la métaphore que nous avons évoqué l’affiche entre la France et l’Italie en imaginant qu’il s’agissait d’une finale de football.

Comment vis-tu ce Mondial en France ?
Je le vis d’un peu plus près que les précédents, notamment auprès de Dika Mem, un joueur j’ai eu pendant 4 ans à l’entraînement. À la fin de la préparation, j’ai beaucoup échangé avec lui pour le remotiver sur les prochains objectifs. Je porte un regard affectif sur Dika et sur Ludo Fabregas.

Quel regard portes-tu sur le jeu de l’équipe de France depuis le début de ce Mondial ?
Chaque entraîneur a sa sensibilité et a sa conception pour conduire des matches qui ont leur histoire avec l’évolution du score, la prestation des joueurs… Didier et Guillaume s’inscrivent dans la préparation des J.O. de Tokyo. Ce n’est pas faire offense à nos joueurs actuels les plus anciens mais les J.O. représentent la compétition de référence pour le monde économique et politique. Ainsi l’équipe se situe dans un renouvellement permanent qui permet aux joueurs d’élever leur niveau de vigilance.

La journée de dimanche a été marquée par l’élimination du Danemark et de l’Allemagne…
L’évolution techno-tactique du Handball s’est élevée partout. La circulation des entraîneurs et donc la circulation des compétences améliore le niveau partout. Le Brésil a longtemps été coaché par un Espagnol, le Qatar par Mr Valero Rivera, la Hongrie est aussi coachée par un Espagnol… Je pense que l’Allemagne a été un peu légère dans l’approche de ce huitième. La présence de la Hongrie en quarts n’est pas une surprise car elle a toujours produit des joueurs compétents issus de leur école de joueurs de ballons. Le Danemark se situe sur une fin de cycle dans une épreuve post-olympique qui est toujours difficile à négocier.

Les salles pleines et l’engouement populaire te surprennent-ils ?
Le Handball amène et véhicule des valeurs que la population recherche. Des valeurs de simplicité, de communion et partage que les joueurs de France A transmettent. Le handballeur est plus abordable. Notre sport est à la fois télégénique et très compréhensible avec des règles qui sont relativement simples à appréhender. De plus, la transformation du jeu par la vitesse de l’engagement, plait aux téléspectateurs. Cet effet Handball ressemble à l’impact du basket auprès de la population après les J.O. de 1992. C’est aussi bien sûr le résultat de tous les bénévoles des clubs qui militent pour magnifier notre activité. Quant un jeune fait du Handball, c’est toute une famille qui s’implique dans le Handball.

Quelle définition donnes-tu à ton métier ?
Au début j’étais entraineur puis je suis devenu un accompagnateur de compétences avec un rôle plus précis. J’étais un entraineur généraliste ; aujourd’hui j’exerce une activité de spécialiste. Auparavant l’entraîneur était seul, maintenant il travaille avec un staff. C’est une véritable chance car cela permet de prendre de la distance et du recul.

C’est vrai aussi chez les A ?
Didier et Guillaume ne sont pas seuls. Ils sont épaulés par Vincent Griveau et par Alain Quintallet lors des entraînements. Didier et Guillaume ont l’avantage d’avoir été des joueurs de très haut niveau. Ils disposent des ingrédients indispensables pour diriger une équipe de France de ce niveau là. Entraîner des adultes de niveau international nécessitent d’autres compétences que de travailles avec les U17 ou les U19. J’ai vraiment le sentiment que la filière fédérale est associée à la production et à la performance de France A. C’était déjà vrai avec Sylvain Nouet, j’ai aujourd’hui la chance de partager des journées avec Didier qui passe au pôle d’Eaubonne et cela nous permet de beaucoup échanger sur les différents apprentissages.