Il y a un an, il dirigeait à Umag, au c?ur de la Croatie, sa dernière partie à la tête de l’équipe de France féminine. Après seize années en qualité de sélectionneur, Olivier Krumbholz a passé la main et ?uvre désormais à la réussite des grands projets au sein de la Fédération. Il est ainsi le directeur sportif du Mondial 2017, mais planche aussi sur «La Maison du Handball », l’un des grands défis des années à venir.


-«Le Conseil d’Administration de la Fédération Française a validé la semaine passée la liste des neuf territoires qui vont être proposés à la Fédération Internationale afin d’accueillir le Championnat du Monde masculin 2017. Vous serez le Directeur de ce Tournoi, en charge des aspects sportifs et des relations avec les Fédérations. En quoi consistera précisément votre rôle ?
C’est un rôle très complémentaire de celui occupé par Edouard Donnelly, le directeur opérationnel. Sur la spécificité même d’un Championnat du monde, il y avait besoin d’une expertise, et j’ai été choisi pour faire en sorte de proposer la meilleure organisation possible à nos partenaires, à la Fédération Internationale, et bien sûr aux équipes que l’on souhaite accueillir dans les meilleures conditions. Nous l’avons toujours fait, à chaque compétition organisée sur notre territoire, mais nous souhaitons faire mieux encore cette fois…

Il y a un an, après seize années à sa tête, vous décrochiez à Umag votre ultime succès avec l’équipe de France féminine face à la Croatie. Les deux rôles sont assez éloignés…
Ils sont éloignés, oui, mais ce rôle-là me plaît tout autant. Je suis plutôt quelqu’un qui aime prendre des responsabilités et les deux fonctions m’offrent cette possibilité. La Fédération s’est lancée sur de grands projets, il faut l’aider à grandir. Je suis happé par ces grands projets, c’est très bien comme ça.

Le métier d’entraîneur vous manque-t-il ?
C’est surtout l’équipe de France qui me manque. Je l’ai tellement encadrée… Le métier aussi, bien sûr… Quand je dis que l’équipe de France me manque, c’est surtout le lien affectif avec les joueuses, celles avec lesquelles nous avons partagés tant de choses. Je garde des contacts amicaux avec certaines d’entre-elles…

« CE QUE FONT LES GARCONS EST EPOUSTOUFLANT »

Avez-vous été sollicité ou tenté par quelques aventures depuis un an ?
J’ai eu des contacts, oui. Ce que je regrette, c’est de ne pas en avoir eu dans le handball masculin. En tout état de cause, je n’ai eu aucune proposition de nature à remettre en cause mon investissement à la Fédération.

Travailler auprès des garçons relève-t-il, alors, d’un nouveau challenge ?
Je ne crois pas. Je ne suis pas venu dans l’organisation du Mondial 2017 dans cet état d’esprit en tout cas. Mais c’est vrai que je vais multiplier les contacts avec le secteur masculin, je vais me déplacer dans les clubs, m’appuyer sur eux, les accompagner, pourquoi pas, dans leurs élans afin qu’ils continuent à grandir.

La France pourrait également être organisatrice de l’Euro féminin 2018. Aimeriez-vous occuper le même rôle que pour le Mondial 2017 ?
C’est effectivement un sujet complètement d’actualité. Nous sommes en pleine discussion à ce propos, et la Fédération compte sur moi pour tenir un rôle au cas où ce tournoi nous serait attribué. Je connais bien le milieu féminin du handball européen, et je peux être utile dans ce contexte. Après, il faudra voir comment rendre ce rôle compatible avec celui que j’occupe aujourd’hui, en définir précisément les contours.

Désormais dirigée par Alain Portes, l’équipe de France féminine s’est logiquement qualifiée pour l’Euro. Gardez-vous un ?il sur ses performances ?
Je regarde, bien sûr, les matches avec toujours autant de plaisir. Je m’étais déplacé au Mondial en Serbie, mais je ne pense pas me déplacer au Championnat d’Europe. Ou alors, ce sera pour observer la manière dont les Hongrois et les Croates se positionnent vis à vis de l’organisation. En revanche, je pense qu’il est indispensable que nous nous rendions au Qatar en janvier prochain pour le Mondial masculin. Même si l’organisation sera très différente, avec quatre sites, tous situés sur la même ville, il y a toujours de bonnes idées à trouver chez les autres. Ce peut également être un moyen d’éviter quelques pièges, de rester en alerte…

Les garçons, justement, ont décroché au Danemark un nouveau titre européen. Que vous inspire leur réussite, mais surtout leur capacité à demeurer au plus haut niveau du handball mondial depuis bientôt dix ans ?
Pour moi, c’est simplement époustouflant. Je l’avoue, quand ils ont gagné en 2008, je pensais qu’ils étaient pas loin d?être au bout de leur histoire. Nous sommes en 2014 et ils sont toujours là… Plein de choses sont étonnantes dans leur aventure. A commencer par cette faculté pour certains joueurs extrêmement matures à être toujours opérationnels. Certains, et Jérôme Fernandez en est certainement l’archétype, ont même fait évoluer leur jeu au point qu’il se bonifie avec le temps. De manière concomitante, Claude (Onesta) a su intégrer des jeunes immédiatement opérationnels et je pense évidemment à Valentin Porte. Le cocktail fonctionne, c’est évident. Je ne vis pas à l’intérieur, mais je pense que tous ont appris à mettre leur ego de côté pour servir le collectif et ce n’est jamais évident. Tristement, logiquement, ce type d’équipes est appelé à s?autodétruire, mais ce n’est pas le cas de l’équipe de France. Il faut quand même bien voir que depuis six-sept ans, la Croatie dispose sans doute d’autant de potentiel, mais n’a pas, loin s’en faut, le même palmarès…

« JE SUIS AVANT TOUT SUPPORTER DE LA LFH, DU HANDBALL FEMININ »

On vous a aperçu du côté de Coubertin cette semaine où se tenaient les finalités des Championnats de France de niveau national. Est-ce une volonté de votre part que de demeurer au plus près du terrain ?
Absolument, je tiens à demeurer au plus près du terrain, afin de conserver un regard aiguisé d’expert. J’ai quasiment suivi tout ce que je pouvais suivre. Je me suis même laissé tenter par un petit coup de main aux garçons de Metz, notamment pour affiner la défense 2-4. J’aime bien, d’ailleurs, cette idée que l’on puisse faire vivre cette défense à laquelle je suis attaché…

Etiez-vous à Fort-de-France pour la 86e Assemblée Générale de la FFHB ? Le handball antillais, dans lequel vous avez longtemps pioché pour composer vos sélections, se porte-t-il bien ?
Non, j’avais d’autres dossiers à traiter au même moment. On l’évoque un peu moins, mais je travaille aussi sur le dossier « Maison du handball ». Il m’a pas mal accaparé ces derniers temps.

Néanmoins, gardez-vous aussi un ?il sur le handball ultramarin qui vous a tant apporté en équipe de France ?
Plus que jamais. En ce moment, le potentiel semble mieux s’exprimer en Guadeloupe qu’en Martinique, mais le handball aux Antilles fonctionne et progresse. On porte aussi un regard en Guyane dont le handball est en pleine progression. Il y a notamment quelques très belles et prometteuses joueuses.

Etes-vous toujours le premier supporter des Messines ?
J’ai envie de dire oui parce que mon changement de fonction m’impose moins d’éloignement désormais… Mais je suis d’abord supporter de la LFH, du handball féminin. Ma fonction de consultant sur la chaîne Sport+ me permet d’être un observateur attentif.

La LFH semble s’être densifiée. Comment, alors, expliquer les difficultés des représentants français en Ligue des Champions ?
C’est délicat de répondre à cette question. Je pense qu’il manque encore de la solidité à nos représentants les plus éminents. Il y a du potentiel, sans doute même de plus en plus, mais il faudra encore un peu de temps pour produire un jeu vraiment rentable au niveau européen. Peut-être faut-il revenir à des choses encore plus simples, comme renforcer les défenses, maîtriser les choses simples. C’est plus un problème de comportement de joueuses que de structures de clubs. Les joueuses avancent dans le professionnalisme, mais peut-être pas aussi vite, justement, que la structure.

Un mot, pour finir, sur votre immense carrière à la tête de l’équipe de France. Si vous deviez ne retenir que trois matches…
Trois ? La finale de 2003, bien sûr, parce qu’elle fut l’accomplissement de quelque chose. Ensuite, je citerais la demi-finale contre l’Espagne au Mondial en Chine en 2009 qui me semble être un match très important pour la nouvelle génération. Et pour finir, le quart de finale contre les Russes au Brésil. Je pourrais en mettre d’autres, beaucoup m’ont marqué. L’équipe de France, entre 2008 et 2012 a fait un beau parcours, mais a malheureusement perdu le match qu’il ne fallait pas perdre contre le Monténégro, aux Jeux de Londres. Sur les seize ans que j’ai passés à sa tête, c’est entre 2009 et 2012 que l’équipe de France a été la plus forte. Le niveau atteint dans la première phase des JO de Londres était impressionnant…

Et trois joueuses ?
D’abord Leïla (Lejeune), sans hésiter. Pour son parcours, pour sa qualité. Je vais mettre Amandine (Leynaud) en deuxième position parce qu’elle a cette capacité à être une très grande joueuse et en même temps à faire montre d’une humilité extraordinaire. Et en trois, j’ai envie de proposer Blandine (Dancette). Elle représente tellement bien l’investissement et l’intelligence comportementale dans un groupe de sport-co. C’est toujours bien d’avoir des filles biens dans une équipe. Elle n’était pas forcément la plus douée à son poste, mais elle démontre que même si l’on n’est pas identifié parmi les plus talentueux, avec l’engagement juste, le bon investissement, on peut tout de même exister au plus haut niveau. »