Comment vis-tu les matches de l’équipe de France depuis que Claude ONESTA fait régulièrement appel à Kentin ?
C’est évidemment un moment particulier car avec l’équipe de France on se situe dans l’excellence. Il y a beaucoup d’attentes et tout est disproportionné à ce niveau-là. Je suis allé le voir jouer une fois en Allemagne mais la dramatique était différente. Je n’étais pas au Qatar mais à chaque fois que j’allumais la télé, c’était très excitant.
T’attendais-tu à ce que Kentin se voit confier autant de responsabilités ?
Son parcours en équipe de France s’est fait crescendo. Il a été appelé pour des matches amicaux, il a observé et est progressivement rentré sur le terrain. L’an passé, il a été retenu pour l’Euro mais il était resté dans les tribunes. Quand le moment arrive, c’est l’exigence suprême. Il faut prendre sa chance et j’estime qu’il l’a plutôt bien prise. Il a su montrer son potentiel et sa compétence. Il s’est montré compétitif pour ses débuts. Face à la Suède, au moment où l’équipe de France était en difficulté, il a réalisé sa prestation la plus aboutie. C’est très valorisant.
As-tu des contacts quotidiens avec lui, notamment sur une compétition telle qu’un Mondial ?
On ne s’appelle pas tous les jours. Parfois il met une semaine à me rappeler ! Il a sa vie et je ne veux pas trop empiéter. Par rapport à l’exigence et à l’urgence d’un Mondial, je me suis permis de lui envoyer des messages pour évoquer les aspects tactiques et techniques avant les matches. En quelque sorte des petits mémos pour l’aider dans la construction de son match, par rapport au poste où il jouerait. Il est réceptif et il prend ce qu’il a à prendre.
Avant même le début du Mondial, comment as-tu accueilli la couverture media faisant référence à votre filiation ?
Je voulais éviter que cela prenne toute la place. Il y a un transfert et il ne peut pas vivre à travers moi. Alors je lui ai dit que c’était son aventure, qu’il devait faire ce qu’il fallait pour écrire la plus belle histoire. Tout enfant est responsable de mener sa passion. En revanche, une fois la victoire acquise, on peut en discuter car symboliquement c’est fort. Avec ma femme, nous sommes très heureux d’avoir contribué à son épanouissement.
Cette belle histoire a permis de rappeler le premier des cinq titres mondiaux remporté il y a exactement 20 ans…
Nous étions des précurseurs. On s’était donné les moyens d’en arriver-là. Nous avions débuté 10 ans plus tôt, lors du Mondial au Portugal. Daniel COSTANTINI nous avait dit de cravacher et que 10 après on serait champions du monde. J’ai remporté ce premier titre à l’âge de 32 ans et mon fils, dès ses 23 ans, le gagne aussi. Le contexte est très différent aujourd’hui avec une attente beaucoup plus importante. Kentin enfile le maillot bleu et il n’a pas le droit de se louper, l’exigence est plus importante.
Il s’agit de ta 2e saison à la tête de Chartres Métropole Handball 28, l’équipe est en progrès par rapport à la saison dernière…
Le club se structure. Nous avons monté un centre de formation, les partenaires sont de plus en plus nombreux et il y a aussi la volonté de bâtir une grande salle. Avant même que j’arrive, les attentes étaient déjà fortes à Chartres avec la volonté de rejoindre la LNH. On se rapproche de l’objectif et la 2e partie de la saison s’annonce palpitante. Je suis concentré pour continuer cette belle aventure et je me sens bien dans cet habit d’entraîneur.
Lorsque tu étais en Allemagne, tu menais parallèlement une carrière de thérapeute manuelle. Et aujourd’hui ?
Le mélange des genres n’est pas toujours bien perçu en France alors qu’en Allemagne, mener 2 ou 3 activités différentes est vue comme un enrichissement. Après une formation de 4 ans à l’école de Sanary-sur-Mer, j’ai beaucoup pratiqué la thérapie manuelle (méthode Poyet) lorsque j’étais en Allemagne. Cela me manque parfois mais je m’y suis fait.
L’entraineur que tu es est-il tenté d’intervenir dans ce registre auprès de ses joueurs ?
Je suis attentif au quotidien. Mais chacun a sa mission dans un staff, les kinésithérapeutes sont dans leur rôle tout comme mon adjoint qui est impliqué à mes côtés. Ma priorité est le terrain et les exigences qui vont avec.
Selon toi en quoi ta formation en ostéopathie a-t-elle sensibilisé Kentin sur l’écoute de son corps ?
Chez les Mahé, le temps où on habitait tous ensemble, on insistait sur la prévention. Très tôt Kentin a été réceptif à la nécessité d’être à l’écoute de son corps pour durer. Pour être prêt à jouer, il y a un travail physique à effectuer en amont. Le handball est un sport impitoyable où il faut être solide avec du mental et de la volonté pour répondre au combat. Il a déjà pris quelques marrons qui l’ont fait souffrir mais il a une force de caractère. Pour ma part, j’étais sûrement l’un des joueurs qui consommaient le plus les kinés qui me voyaient avant, pendant et après les matches. Après 20 ans de carrière de haut niveau, j’y ai laissé des plumes avec des douleurs un peu partout.
Revenons au 5e titre de l’équipe de France. Quel regard portes-tu sur son parcours victorieux ?
Des observateurs assuraient qu’elle gagnerait facilement car les adversaires se situaient tellement loin. On a finalement observé un resserrement sur chaque match avec des équipes capables de contrarier l’équipe de France. Malgré des matches plus difficiles, à la fin c’est toujours la France qui gagne. C’est une marque de fabrique. La concurrence travaille pour renverser la montagne française mais les Bleus possèdent encore un petit d’avance avec une capacité à se montrer plus forts dans les moments importants.
Et que t’inspire le parcours de l’équipe du Qatar ?
Valero RIVERA a réussi à faire prendre la mayonnaise. Avec un esprit commando et beaucoup de travail il a prouvé qu’il y avait moyen de faire quelque chose.
Si les Experts vous ont déjà souhaité un bon anniversaire, quand avez-vous prévu de souffler vos bougies ?
Denis LATHOUD est aux manettes pour organiser les 20 ans du titre. Une grosse fête est prévue le week-end du 5-6 juin en région Rhône-Alpes. J’invite la France entière à nous rejoindre pour fêter le titre.