Conseiller technique national chargé de la coordination et du développement du BeachHandball, Eric Quintin revient sur trois semaines intenses, à quelques jours des qualifications pour le Championnat d’Europe 2025 qui se dérouleront du 8 au 14 juillet à Varna, en Bulgarie.

Y a-t-il eu en ce mois de juin 2024 une seule journée sans Beach ?

Sans doute pas beaucoup. Et ce sera pareil pour le mois de juillet. Le Beach, c’est un autre calendrier auquel nous devons nous habituer. C’est d’ailleurs l’une des causes de nos difficultés : trouver de la place pour le Beach dans un calendrier qui reste un calendrier handball, autrement dit assurer sa promotion, faire du militantisme tout en occupant ces cases vides.

Comment se sont passés les cinq jours de stage à Châteauroux avec ces rencontres face à Suède et À la Pologne ?

Je n’ai pas envie de dissocier les trois semaines que nous venons de vivre. D’abord ce premier tournoi EBT Lacanau Beach Handball Xperience suivi des finales EBT qui ont fait l’unanimité auprès des participants en dépit d’une météo capricieuse. On a appris des choses à Lacanau qui vont nous faire grandir. Et puis donc, oui, Châteauroux, avec d’abord les finales des Intercomités, puis ce stage des deux équipes de France. Trois semaines pour voir le plus haut niveau du Beach, niveau de jeu, mais surtout capacité d’organisation. A Lacanau comme à Châteauroux, nous avons deux environnements extraordinaires, avec des dirigeants, des bénévoles, qui ont fait preuve d’un don de soi, qui sont allés chercher des ressources insoupçonnées. J’ai toujours besoin d’un peu de temps pour organiser les émotions, faire des analyses, mais ce qu’a réussi Lacanau est tout à fait improbable. C’est un club qui compte à peine 150 licenciés mais qui a su mobiliser un budget de 350 000 euros pour proposer ce spectacle. L’Europe du Beach n’a qu’une hâte : revenir. Malgré, une fois encore, la météo, une lumière tristounette.

Châteauroux est également en train de devenir une autre place forte…

Châteauroux, c’est le Orléans des Intercomités. Une installation assez extraordinaire, avec deux-trois terrains magnifiques, un sable somptueux, des conditions de travail incroyables. D’une manière générale, Châteauroux fait beaucoup pour sa jeunesse. Et beaucoup pour le Beach aussi.

Après les trois premiers stages de 2024, les équipes de France masculine et féminine ont-elles gagné en stabilité ?

Oui, avec deux sentiments un peu différents. A Lacanau, les vainqueurs ont souligné l’écart à combler pour prétendre rivaliser avec les meilleurs. Ça m’a rappelé le fossé qu’il y avait avec les Yougoslaves ou les Soviétiques dans les années 80. Sans s’en rendre compte, en travaillant beaucoup, nous l’avions comblé. C’est pareil au Beach. On avance. Le plan ressemble à ce que l’on espérait. La locomotive, ce sont les deux équipes de France, mais il y a les minots, les Intercomités, la Coupe de France… Des tournois émergent, des clubs émergent. Il y a tout un processus enclenché. Aux finalités des Intercomités, j’ai vu des minots avec, déjà, une véritable culture du Beach.

Les deux collectifs sont-ils prêts pour les qualifications au Championnat d’Europe 2025 qui se dérouleront du 8 au 14 juillet à Varna, en Bulgarie ?
Ils le sont, oui, comme le sont tous les collectifs qualifiés.

Sont-elles au niveau de la Bulgarie, la République tchèque, Malte et la Norvège pour les hommes, et la Hongrie, la Suède, l’Italie, la République tchèque et la Slovaquie pour les femmes ?

Ce n’est pas vraiment la question. Ce qui compte, c’est nous. On voit contre les Suédois, un adversaire qui navigue dans les mêmes eaux, que l’on est continuellement sur le fil. Nous ne sommes pas au niveau des 5/6, voire même 8 meilleures nations européennes. Dans ces qualifications, il y une meute de prétendants, et tout va se jouer dans le détail et c’est ce qui est assez génial, finalement, dans ce chemin vers le haut niveau. Federer dit qu’il a gagné 90% de ses matches en remportant 54% de ses points importants. Il faut être là quand l’intensité est à son comble. Là mentalement, dans la précision, c’est ce qui génère les meilleures émotions.

Étant donnés les efforts consentis par la FFHandball, cette qualification est-elle vitale pour le Beach français ?

Le Beach a un caractère un peu particulier. Au hand, quand tu domines, tu digères plus facilement les temps faibles. Au Beach, ça peut vite de glisser entre les mains si tu diminues l’intensité dans ta concentration. Comme au handball à 7, il faut participer aux compétitions pour progresser. C’est comme ça que tu te construits, que tu grandis et les talents te permettent ensuite de passer un cap. La FFHandball a beaucoup investi dans le Beach, quelque 450 000 euros pour les équipes de France et le PPF, c’est, je crois, à l’image de ce qui se fait en Allemagne. Mais les Allemands ont un bagage joueurs plus important. Ils sont aussi plus en avance sur la relation avec les clubs. La disponibilité des joueuses et des joueurs est plus fluide. Chez nous, les techniciens viennent de plus en plus au Beach, qui est un lieu d’échanges, de débats. Ce transfert d’apprentissage est utile au développement des joueuses et des joueurs. Mais tous les cadres ne sont malheureusement pas toujours concernés par le développement des joueurs.

A Châteauroux avaient également lieu les finales des Intercomités. Quel bilan en tires-tu ?

C’était plus homogène, plus relevé que la saison passée, un niveau presque inattendu. Nous avons eu droit à des finales magnifiques. Avec ces athlètes de 15 ans, on a pu constater que les garçons étaient en avance physiquement, alors que les filles misent plus sur les qualités collectives. Ce qui est sûr, c’est que les cadres s’intéressent de plus en plus, se forment et accomplissent un superbe travail. Plus de la moitié des départements se sont engagés, une cinquantaine au total. C’est génial.

Le week-end prochain, les finales de Coupe de France se dérouleront sur ce même site. Qu’attendre de cette troisième édition ?

Elle sera encore plus forte en terme de niveau. On sait que des équipes, des joueuses et des joueurs se sont préparés sur le premier tournoi de Lacanau. Il y a désormais un peu de bagage derrière. Il n’y a plus d’équipe qui arrive sans connaître les règles.

Ça signifie que le Beach est en train de trouver sa place ?

Ça fait mieux que germer, on commence à voir les pousses. On a fait notre place, oui. Je ne sais pas mesurer l’ampleur du mouvement, je ne pense pas que l’on pèse grand chose au regard des presque 600 000 licenciés, mais il faut compter avec le Beach, c’est certain. 

Qu’as-tu pensé des prestations des deux collectifs U16 en marge de l’EBT ?

C’était le premier tournoi de cette nouvelle génération, de ce nouveau staff. On sent des progrès qu’il faudra confirmer.

Tu es, avec Laurent Munier et Bhakti Ong, à l’origine de la création du Sandball que tu qualifiais alors de spectaculaire, ludique, convivial. Le Beach emprunte-t-il le meilleur du hand et du sand ?

À Lacanau, nous étions à quelques kilomètres de Montalivet où tout a commencé. Mais oui, le Beach propose plus de convivialité, plus de mixité, un esprit de famille assez singulier, non ordinaire, et il emprunte le meilleur aux deux, c’est ma vision en tout cas. 

Le Beach a-t-il selon toi les atouts nécessaires pour intégrer le programme olympique ?

Oui, si l’on considère les sports qui intègrent ce programme. Mais de ce que je connais des forces de lobbying à mobiliser pour un tel objectif, c’est plus compliqué. 

La Halle Beach à la MDH sera-t-elle un outil indispensable pour le développement de la discipline ?

C’est un outil fantastique. La Maison du Handball ne peut être nommée ainsi qu’à la condition qu’elle accueille toutes les pratiques. Il y a des sites comme Houlgate, Ajaccio et donc Châteauroux, qui donnent envie à toutes les équipes d’Europe de venir travailler. Et puis cette halle à Paris qui possèdera d’autres atouts.

Pour finir, comment vas-tu suivre le parcours des deux équipes de France aux Jeux olympiques ?

Avec un oeil dubitatif. Décréter qu’il s’agit d’une fête populaire et voir comment ça se passe m’interroge un peu. Mais c’est un rassemblement universel fantastique. Je vais les suivre plus comme un passionné de sport que comme un patriote. Je suis évidemment fan des équipes de France et je souhaite que Niko (Karabatic) puisse aller jusqu’au bout de ce chemin fantastique. Et puis il y a quelques jeunes pour lesquels j’éprouve non pas de l’amour mais presque. Je sais leur caractère, leurs émotions, et je vais vivre ce tournoi au travers de ça. Ce qui est sûr, c’est que l’on a vraiment besoin du sport dans cette période compliquée pour rester unis.