CTS sur le Territoire de Bourgogne – Franche-Comté, responsable pédagogique de l’Institut de Développement du Sport par la Formation et l’emploi (IDSF), Joëlle Demouge est la nouvelle sélectionneuse de l’équipe de France féminine de BeachHandball.

Tu es la nouvelle sélectionneuse de l’équipe de France. Comment allez-vous vous répartir les tâches avec Marion Limal, nommée entraîneuse ?

Nous avons effectivement procédé à quelques retouches en repositionnant Marion qui achève son congé maternité. Valérie Nicolas n’était pas en mesure de se libérer sur l’ensemble des stages, mais elle va demeurer dans le staff, en tant que préparatrice des gardiennes et parce que la relation qu’elle a entretenue avec l’EHF constitue un réel atout.

Pour le reste, il y a encore un peu de flou, nous sommes en train de construire les missions de chacune. Moi, je serai en lien avec la FFHandball et son secteur performance pour tout ce qui touche à l’administratif, la représentation, l’organisation des stages, la gestion des staffs. Une cheffe de projets en quelque sorte. Marion sera sur le terrain. Elle connait bien la pratique, alors que je ne l’ai jamais exercée, et ses ressentis seront forcément intéressants. J’ai bien assimilé cet environnement, mais c’est important d’avoir quelqu’un qui a connu le milieu de l’intérieur. Et puis, si elle a obtenu le titre à finalité professionnelle de niveau 5, et qu’elle a donc des pistes pour entraîner, elle ne les a encore pas beaucoup mises à l’épreuve, alors que j’ai une connaissance plus générale du terrain, de la relation avec la joueuse, avec un staff. Ça nous permettra de nous compléter.

À quand remonte ta passion pour le Beach ?

A l’été 2018, lorsque j’ai été choisie comme adjointe. J’ai tout de suite adoré et adhéré. C’est plus détendu que le handball, on se prend moins la tête.

Qu’est-ce qui t’a d’abord attiré ?

C’est un sport de compétition et c’est le plus important. Mais un sport de compétition avec un état d’esprit un peu différent. Le fait qu’il se pratique à l’extérieur fait qu’il est plus ouvert, qu’il attire d’autres publics. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est que les compétitions se jouent dans un laps de temps réduit, en cinq jours, et qu’il faut donc être capable de vite réagir. On peut enchaîner deux ou trois matches dans une journée, et ça nous oblige à être hyper réactif. Ce qui est également intéressant, c’est le format de la compétition. Les équipes restent sur place pendant les cinq journées, ça permet des échanges, et les contacts sont facilités. La mixité me plaît beaucoup également, on peut s’enrichir mutuellement et je trouve cela relativement sain. À l’Euro 2022 à Prague, en 2022, il y avait même les jeunes.

Justement, toi qui a toujours aimé travailler avec la jeunesse, que penses-tu de la formation du Beach en France ?

Au-delà de l’équipe de France, je suis la filière féminine et notamment les U16. On a un espace très important entre les U16 et les adultes puisqu’il n’y a pas de compétition U18. Nous ne savons pas, aujourd’hui, si la génération 2008/2009 va participer à un Mondial, et c’est un vrai problème. Sinon, et c’est tout nouveau, nous étions jusqu’à présent en parallèle du PPF, et nous allons mettre en place un stage national en février 2024 avec les jeunes issus des compétitions inter-comités et inter-secteurs, et ceux issus de la filière PPF. Avec un tel regroupement, nous pourrons identifier des profils et dresser une liste.

Ces inter-comités se sont déroulés à Châteauroux, parallèlement à la deuxième édition de la coupe de France. Qu’as-tu retenu de cette compétition ? Il y a un élan, c’est incontestable. J’ai trouvé une vraie évolution dans le jeu entre 2022 et 2023. Les équipes étaient mieux préparées, même si certaines arrivent encore avec seulement un entraînement et demi avant la compétition. Il faut d’ailleurs continuer d’aider les Ligues et les Comités à se structurer.

Les vainqueurs vont disputer la Champions Cup à Porto Santo…

On réfléchit à la meilleure manière d’aider ces équipes. Mais nous sommes toujours confrontés au même problème. Si cette compétition tombe finalement au bon moment pour les filles du Brest Bretagne Handball puisqu’elle aura lieu sur une semaine internationale, les garçons de la Ligue Grand Est, eux, auront leur Championnat et ne pourront pas aller au Portugal dans les meilleures conditions.

Ce souci de disponibilité n’est-il pas le principal écueil de la discipline ? Lors du dernier Euro, les joueuses majeures n’étaient pas disponibles…

On avance dans la relation avec les clubs, mais c’est compliqué. Nous sommes en fait sur le bon-vouloir des entraîneurs. Il y a ceux qui pensent que la pratique est intéressante et bénéfique pour les joueuses, et ceux qui nourrissent des réticences. Nous devons continuer à mettre du lien pour avancer, parce que je reste convaincue que les deux pratiques sont complémentaires et se nourrissent l’une de l’autre.

C’est à dire ?

Le Beach apporte des bénéfices sur les aspects cardiologique, perceptif, tactique, physiologique, physique. Il permet de progresser physiquement, renforce la tonicité, l’amélioration des déplacements. Quand la joueuse revient sur le dur, elle bénéficie forcément de cette préparation-là. Et puis il y a énormément de mouvements, des enchaînements d’actions qui améliorent ta lecture, ta confiance.

Peut-on imaginer une équipe constituée de joueuses qui n’évolueraient pas en salle mais exclusivement sur le sable ?

Non, nous n’aurions rien à leur offrir. Tout le monde parle de ça, et je peux le comprendre. Mais on ne vit pas du Beach qui n’est toujours pas un sport olympique. On regarde du côté du rugby à 7 ou du basket 3/3, qui eux sont olympiques, mais on ne peut pas calquer notre pratique sur ces exemples-là. Cela-dit, nous sommes persuadés que le Beach peut être une source de développement, pas seulement sportive mais économique pour la FFHandball qui améliorerait encore sa visibilité.

Reste à décrocher des résultats au niveau international. Comment y parvenir ?

Il faut être un peu patient. Depuis quatre saisons, nous avons mis en place des stages pour des développeurs/animateurs capables d’animer des séances, de mettre en place des sites, d’utiliser ceux qui existent déjà. 220 personnes sont aujourd’hui capables de dispenser la pratique. Mais ces personnes veulent aller plus loin et disposer d’un niveau entraîneur. Nous avons lancé le certificat, c’est le deuxième niveau de notre intervention. On structure, on avance, chaque jour nous tentons de faire mieux, mais nous ne sommes que les pionniers de cette aventure, même si nous parvenons à évaluer les effets de notre engagement année après année. Pour répondre à la question, le retentissement serait plus important si les résultats à haut niveau suivaient.

En fait, après avoir privilégié les équipes de France, il est maintenant temps de favoriser la pratique de masse pour garantir le renouvellement et faciliter la performance…

C’est exactement ça. On a commencé par le haut, on s’intéresse désormais à la base pour continuer à avancer. Nous sommes surtout très soutenus par la DTN et nous échangeons souvent avec Pascal Bourgeais, Éric Baradat et Jacky Bertholet.

Quels sont désormais les objectifs de l’équipe de France ? La qualification à l’Euro 2025 en juillet prochain ?

Oui, et elle aura lieu la première semaine de juillet, ce qui devrait nous permettre de disposer de toutes nos joueuses si les clubs professionnels veulent bien les libérer. Mais il y un problème de statut par rapport à leurs congés. Il faut que l’on revoit cette problématique du statut de la joueuse internationale. Le paradoxe, c’est que l’arrière gauche d’ATH (Strasbourg Achenheim Truchtersheim) est dans l’équipe portugaise de Beach, comme la meneuse de Clermont, ou que la gardienne de Besançon joue pour la Norvège…

Cette qualification est-elle fondamentale ?

Oui, parce que j’ai la sensation que nous pouvons entrer dans un quart de finale d’un Euro, ce qui nous qualifierait pour un Championnat du monde et enclencherait la dynamique. Le niveau a pourtant évolué. Nous nous étions qualifiés en 2018 avec une équipe qui ne s’était quasiment pas préparée. Mais les choses ont changé…