273 sélections, 696 buts et les trois titres majeurs remportés avec les Bleues, une grande dame du handball vient aussi d’achever sa carrière dimanche avec Metz HB et un doublé championnat – coupe de France. Alli revient sur son parcours et évoque son avenir.

Tu as tiré ta révérence. Est-ce que tu as le sentiment d’avoir bouclé la boucle ?

Oui, honnêtement, aujourd’hui je suis arrivée au bout du bout. Je pense que j’ai donné tout ce que j’avais à donner au handball, et je n’ai aucun regret. Je suis en paix avec cette décision. J’ai vécu une carrière pleine, riche, intense. Et ce que je ressens aujourd’hui, c’est de la gratitude.

Quels sont les moments où tu t’es sentie au sommet de ton art ?

Il y en a plusieurs. Je pense que la période entre 2011 et 2017 a été très forte pour moi. Même en club, j’étais très performante. Je pense notamment à la saison 2015-2016 avec Baia Mare en Roumanie : j’étais dans le top 5 des meilleures marqueuses de la Ligue des Champions. Je crois que je tournais autour de 80 buts cette saison-là. C’était une très grosse saison.

Quelle est la joueuse la plus forte avec laquelle tu as jouée et pourquoi ?

J’ai joué avec tellement de filles qui étaient fortes… La qualité de passe de Bella Gulden m’a toujours impressionnée, avec cette vista qu’elle avait, à mettre le ballon où elle voulait.

Quand tu étais gamine, est-ce que tu avais déjà cette ambition-là ? Cette envie d’exister dans la lumière ?

Oui. Je l’ai toujours eue. J’ai grandi avec cette conviction que je ferais du sport de haut niveau. J’étais cette fille qui sortait jouer dehors avec ses potes, qui touchait à tout. J’ai fait plein de sports avant d’atterrir au handball. Et surtout, j’ai grandi avec une idole.

Laquelle ?

Marie-José Pérec. Je la revois encore à Atlanta, en 1996… Je me disais : « Moi aussi, je veux être sur ce toit-là. Je veux exister comme elle. » On est toutes les deux de Guadeloupe, les gens nous comparaient beaucoup, physiquement, dans notre puissance. On pensait que je ferais de l’athlé, à la base. Mais c’est cette image de Marie-Jo qui m’a construite. C’est comme ça que je me suis faite. J’ai eu la chance qu’elle écrive la préface de ma biographie. Aujourd’hui, je peux le dire : je suis une femme d’histoire. J’aime écrire des histoires. C’est comme ça que j’ai vécu ma carrière.

Tu as toujours aimé représenter ton sport, aller au contact, porter quelque chose de plus grand que toi. C’était important, ça ?

Énormément. J’ai compris très tôt que représenter son sport, c’est une part essentielle de ce qu’on construit. J’ai toujours voulu emmener le handball là où il n’était jamais allé, le faire briller au-delà du terrain. Ça m’a apporté beaucoup, et ça a apporté à mon sport aussi. Aujourd’hui encore, il y a des gens qui ne me connaissent pas forcément à travers mes stats, mais à travers ce que j’ai symbolisé. Je me souviens de quelques moments marquants : au Japon, par exemple. Des gens m’attendaient à la sortie des bagages avec du saké ! Là, tu comprends que tu as dépassé ton sport, que ton image, ton travail, ont porté quelque chose de plus large.

Tu parles souvent de ton après-carrière avec beaucoup de sérénité. Tu avais anticipé ?

Oui. Depuis longtemps, je prépare mon après. Je suis bien lotie, comme je dis souvent. J’ai repris mes études, je développe une start-up, j’ai des projets personnels. Je suis investie dans Laboratoire Natiyé, une entreprise fondée en Guadeloupe par Agnès Crochema-Galou, Docteur en pharmacie et ancienne volleyeuse de haut niveau. le Laboratoire Natiyé conçoit notamment une gamme de soins 100% naturels pour les douleurs musculaires liées à l’effort, à partir de produits naturels à base de plantes des Caraïbes. C’est un projet qui me ressemble.

Tu as tout de même programmé des vacances…

Mais avant tout ça, là tout de suite, je pars en vacances. Un vrai mois. En Asie, entre Indonésie, Singapour, Hong Kong… Et cette fois, ce ne sera pas des vacances à tourner autour de la muscu et des entraînements. Ça va me faire un bien fou.

Tu continueras à faire du sport malgré tout ?

Évidemment. J’en ai besoin, c’est dans mon ADN. Mais je vais tester d’autres choses : peut-être du paddle, du tennis… des sports individuels. Je pense que j’ai envie de découvrir autre chose, dans une autre énergie.

Tu te vois revenir dans le handball, d’une façon ou d’une autre ?

Je suis ouverte, mais ce ne sera pas en tant que coach ou ni agent. Ce n’est pas mon truc. En revanche, je me verrais bien mener un club, prendre un rôle de directrice générale, voire un jour présidente. Parce que j’ai cette vision. J’ai joué dans plein de pays, je connais les réalités des clubs, les besoins des joueuses, les limites des structures. Ce que je peux apporter, ce n’est pas que de l’expérience de terrain : c’est une compréhension globale du sport, et notamment du sport féminin.

Tu termines cette aventure avec quoi, au fond ?

Avec de la fierté. Pas seulement pour ce que j’ai gagné. Mais pour ce que j’ai représenté. Ce que j’ai transmis. Et ce que je continuerai à construire. Parce que pour moi, ce n’est pas la fin d’un cycle, c’est le début d’une autre histoire.