Vice-président en charge des affaires juridiques et du sport professionnel, Rémy Levy est le chef de délégation de l’équipe de France féminine depuis la saison 2021-2022. Il explique son rôle à l’amorce de la dernière semaine de compétition qui pourrait voir les Bleues rejoindre Ljubljana pour disputer le carré final.
Comme devient-on chef de délégation auprès de l’équipe de France ?
Je n’ai pas fait de formation. Je suis empiriste et j’ai toujours pensé dans mon existence que la meilleure formation était d’apprendre sur le tas. Le rôle de chef de délégation, ce n’est pas un chef au sens martial du terme, c’est le représentant de la fédération au sein de la délégation.
Comment s’est opérée ton entrée dans le staff ?
Olivier Krumbholz avait demandé à Philippe Bana si je pouvais venir comme chef de délégation. C’est vrai que j’étais attiré par la sélection nationale et par la personnalité d’Olivier. J’ai travaillé dans ma vie uniquement avec deux coaches : 15 ans avec Patrice Canayer, cela ne sera pas autant certainement avec Olivier puisqu’il a annoncé son départ après les J.O. de Paris 2024 mais ce sera une période exceptionnelle. Je découvre et apprécie beaucoup aussi Sébastien Gardillou qui fait un gros boulot comme adjoint. Pour moi, c’était très tenant de prendre cette dimension.
En quoi ce rôle diffère avec celui que tu as connu avec le Montpellier Handball ?
La grande différence, c’est la notion temporelle avec l’idée de faire au mieux sur des périodes courtes. Le contexte est donc différent. J’ai passé 15 ans avec les garçons de Montpellier, aujourd’hui c’est l’équipe nationale féminine, c’est une autre relation, tout autant professionnelle, qu’avec une équipe masculine. Il y a une dimension humaine qui est forte, c’est l’appartenance à la sélection nationale. Être debout avec le staff et chanter la Marseillaise, c’est quelque chose dans une vie. Ce sont des moments uniques.
Sur cette compétition, quels sont les domaines d’intervention ?
Aujourd’hui le rôle du chef de délégation est d’être présent pour représenter la sélection dans les moments officiels des compétitions et aussi d’essayer de lever quelques difficultés. Tout cela se fait aussi avec le large concours de Pascal Bourgeais, Directeur technique national, qui a une grande expérience et de Diane Prouhet, team-manager, également en charge de la communication et omniprésente.
Et en interne avec le staff, en quoi consiste ton rôle ?
C’est quelque chose de nouveau, j’essaie d’être présent sans empiéter sur les domaines d’intervention de chacun, le tout c’est d’être le trait d’union entre tout le monde et de les accompagner. L’organisation existe déjà et elle est parfaite : le sportif, le médical, la communication et l’intendance. Tout est déjà bien réglé et on voit bien que cette équipe est très professionnelle sur le terrain et dans l’entourage. Donc je suis arrivé sur la pointe des pieds, au sein d’une mécanique bien huilée.
Et auprès de tes collègues administrateurs de la FFHandball ?
En plus de points effectués en bureau fédéral, un bilan sera effectué lors du prochain conseil d’administration, les 25 et 26 novembre. Il existe aussi naturellement des échanges informels au travers des messages, notamment sur le groupe de communication avec les membres de Handball2024. Comme tout est transversal au sein de la fédération, les échanges sont nombreux.
En quoi le possible changement de site vers la Slovénie est-il une complexité ?
Tout est réglé par l’organisation locale. Un charter est réservé jeudi pour transporter les trois équipes qualifiées entre Skopje et Ljubljana. Tout est réglé au niveau de l’intendance. Un repérage a déjà été effectué par Sébastien Gardillou et Diane Prouhet bien en amont de la compétition. C’est positif d’effectuer le tour préliminaire et le tour principal sur le même site car nous avons nos repères. La seule chose un peu difficile à gérer, c’est le rythme de la compétition avec les trois jours sans jouer la semaine passée alors que mardi et mercredi, nous allons enchaîner deux matchs. Ces temps internes à la compétition nécessitent d’être gérés. Pierre Terzi, le préparateur physique, m’impressionne avec son savoir-faire, sa constance et son anticipation. Il est un élément essentiel dans l’organisation de l‘équipe de France. Il faut bien sûr saluer aussi le rôle de David Burguin et Christophe Caillabet pour l’analyse vidéo, toujours au top, le docteur William Forêt, les kinés, Pierre Gillet, Célestin Dailly et Cesare Cocuzza, un secteur très performant dans les soins et la récupération ainsi que le rôle important de Pascal Niggel, le psychologue. Et bien sûr l’arrivée de la légendaire Amandine Leynaud dont le travail avec les gardiennes est déjà prépondérant. Une équipe aussi performante que celle qui est sur le terrain.
Tu es un observateur privilégié pour donner le pouls de l’équipe de France…
Je ressens une ADN, une culture de la performance. Cette équipe, depuis quelques années, s’est installée dans cette vision de la performance. Le handball français produit des athlètes de haut niveau et notre championnat de Ligue Butagaz Énergie, le plus représenté sur cet Euro, rassemble de grandes joueuses françaises et étrangères. Le niveau sportif a considérablement monté. Cette équipe dispose d’une belle génération et d’une pyramide des âges, avec Béatrice Edwige, Cléopatre Darleux, Grâce Zaadi Deuna, jusqu’à Léna Grandveau qui a 19 ans. Cette équipe est bien structurée et comme à Montpellier, je retrouve cette culture de la performance et cette confiance dans la gestion des compétitions de haut niveau.
Au cœur de l’été, la présidente de la CNCG a démissionné entraînant de facto la démission de l’ensemble des membres. Quel éclairage peux-tu apporter à cet épisode estival ?
C’est la vie des fédérations. Les commissions sont indépendantes dans leur fonctionnement. En revanche les nominations dépendent du bureau fédéral et doivent être respectées par les membres des commissions. Madame Moraglia a choisi de démissionner et cela a entraîné une démission collective, conformément aux statuts de la fédération. Est-ce que tous les membres de la commission connaissaient les conséquences de la démission de la présidente (?), je pose la question. Ce qui compte, c’est l’institution et sa permanence. Les statuts ont été appliqués et le bureau fédéral a récupéré la compétence de la CNCG. J’ai été mandaté pour assurer la présidence et nous avons commencé notre travail dès le lendemain. Je crois pouvoir dire que jamais les clubs n’ont été aussi bien servis, en matière de délai, que l’été passé, avec près d’une centaine de décisions rendues, dans un cadre serein. La continuité du service a été assurée et je ne cesserai de remercier le service juridique de la fédération et plus particulièrement Gwenhaël Samper et Maxime Lameloise, très investis à mes côtés.
Une nouvelle équipe compose désormais la CNCG avec pour président Jean-Marie Brinon…
Il y a quelques semaines maintenant, nous avons nommé les nouveaux membres de la commission dont les compétences me paraissent nettement supérieures. Ce n’est pas une question de personnes mais de connaissance de l’évolution des choses. Il fallait aussi repenser la philosophie de la commission. La sémantique a toujours une importance. À la LNH pendant 10 ans, je travaillais avec la CNACG qui est une commission d’aide et de contrôle de gestion. Certes elle sanctionne mais elle fait de la prévention. J’ai suggéré que l’on fasse de même à la fédération. La CNCG n’est pas seulement un gendarme, mais aussi un régulateur économique pour accompagner les clubs. Je trouve que Jean-Marie Brinon, son parcours professionnel le démontre, est un homme de grande compétence, anime une équipe très compétente avec des profils expérimentés (avocats, comptables, financiers) dans l’univers du sport.
Ce changement a généré une polémique et tu n’as pas été épargné médiatiquement…
Les propos tenus dans Ouest-France par Christophe Delacroix qui me fait la guerre depuis quelques années, puisqu’il a transféré la rivalité Nantes-Montpellier, entre lui et moi, seront réglés ailleurs, devant un tribunal. Jamais je ne me suis occupé de Bourg-de-Péage autrement que sur le volet juridique. Il m’a été demandé d’interpréter la convention liant l’association et la société sportive professionnelle, cela a été fait, c’est mon domaine de compétence exclusive. Alors quand Madame Moraglia a déclaré que j’avais amené le repreneur, Monsieur Pamart, que je ne connais pas, c’est stupéfiant. Je n’ai jamais mis le doigt, à aucun moment, dans le processus de reprise. En revanche, il faudra peut-être que Madame Moraglia s’explique sur sa gestion du cas Bourg-de-Péage plutôt que de me chercher des noises. Je peux entendre les critiques mais pas les attaques sur mon éthique en tant qu’avocat et mon honnêteté. J’ai 42 ans de barreau à Montpellier et je suis élu au national au bureau de la conférence des bâtonniers. Je ne peux pas le laisser passer.
Propos recueillis par Hubert Guériau