Le président de la Ligue, Paul Polydore, souligne tous les efforts effectués par son équipe pour limiter les effets de la crise sanitaire. Des efforts qui ont même, semble-t-il, redynamisé le handball guyanais.

Comment le handball guyanais a-t-il traversé la crise sanitaire ?
C’est très paradoxal parce qu’il s’est trouvé en grosse difficultés avec une diminution de 30% des licenciés et que tout le travail effectué entre 2017 et 2020 a bien failli être anéanti.

Paradoxal ?
Oui parce si la crise a confiné les corps, elles n’a heureusement pas confiné notre esprit de créativité. Nous avions mis en place des séances d’information en visioconférence, tous les jeudis, pour garder l’activité vivante, échanger, partager les expériences. Finalement, lorsque nous avons pu renouer avec cette activité, j’ai senti un dynamisme très rafraichissant.

Comment s’est-il matérialisé ?
Déjà, nous avons réussi à ramener assez vite les licenciés dans les clubs. C’était notre volonté : redynamiser notre handball et le faire reconnaître comme l’un des premiers sports de Guyane. Les résultats sont au-delà de nos espérances. Il y a une énergie qui se dégage, sur les terrains, dans les tribunes. Ces jours-ci, on a atteint les 1200 licenciés et je pense que nous serons 1500 au terme de la saison.

C’est un miracle…
Nous avons proposé aux clubs de nouvelles pratiques, le hand à 4, le hand sur gazon, le beach. Ils ont adhéré immédiatement. L’avantage en Guyane, c’est que 45% de la population a moins de vingt ans.

Les contraintes sanitaires n’ont donc eu que très peu d’effets ?
Nous avons en Guyane un taux de vaccination très bas et certains n’ont pas pu participer aux rassemblements et aux compétitions. Mais nous avons bénéficié de mesures de tolérance de l’ARS et de la préfecture qui nous ont permis de mieux rebondir que d’autres.

Comment se porte votre Ligue aujourd’hui ?
Elle se porte assez bien. On essaie de créer une nouvelle façon de concevoir le handball, avec la mise en place d’un dispositif gagnant-gagnant avec les partenaires parce que les subventions ne suffisent plus.

Les infrastructures sont-elles à la hauteur de vos ambitions ?
Nous avons cette chance, oui, de disposer d’outils performants. De par ma profession -je construis pour les collectivités-, je peux vous dire que nous sommes en train de lancer cinq lycées et six collèges qui seront tous équipés de gymnases avec des revêtements adéquats pour les sports collectifs. Mes collègues de Martinique et Guadeloupe, ceux de Mayotte me rappellent souvent la chance que nous avons. La difficulté, maintenant, c’est de voir avec les chefs d’établissements comment mettre ces outils à disposition des associations comme la loi l’exige.

Les clubs pourraient ainsi accélérer leur développement ?
Nous avons fait ce constat que la Ligue est peut-être allé trop vite dans son développement. Nous sommes montés d’un échelon là où les clubs sont restés trop bas. On essaie aujourd’hui d’équilibrer tout ça afin de ne laisser personne sur le carreau. L’intérêt, c’est d’avancer avec eux, tous ensemble. Il faut qu’on les accompagne. On a ce gros travail collectif à effectuer.

Comment comptez-vous vous y prendre ?
Nous avons fait des choix au niveau de l’emploi. Je suis arrivé en 2017. En 2019, on mettait en place un Pôle d’accession féminin, et en 2021, un Pôle masculin avec donc deux CTS pour les animer. Depuis le premier janvier, nous avons pris trois jeunes sous contrats d’apprentissage que nous mettrons à disposition des clubs. Aucun club n’a les moyens d’embaucher des apprentis. Ils interviendront dans les domaines technique et administratif. Ils sont inscrits sur le titre 4, et il faut qu’ils soient en mesure d’apporter quelque chose aux clubs. Ils sont demandeurs, mais ils sont dans l’observation. C’est à la Ligue de tracer le chemin.

L’une de vos formules de campagne était : « Pour un handball audacieux, performant, partagé et qui nous rassemble ». Est-il rassemblé aujourd’hui ?
Les gens ne se parlaient plus. Il était urgent, oui, de rassembler. La Ligue sans les clubs n’est rien du tout. On a peut-être enfin compris qu’il existe un esprit du handball guyanais et qu’il serait bon de l’entretenir. Pour moi, c’est très important. D’autant que le sport est le meilleur vecteur d’avenir pour les jeunes qui peuvent s’affirmer, se développer, prendre confiance en eux.

Le basket a multiplié par deux le nombre de ses licenciés…
On a bien sûr intérêt à occuper la place, faire en sorte que les Championnats aillent à leur terme, que nos structures fonctionnent. On a l’avantage de servir d’exemple avec neuf clubs masculins et sept clubs féminins. Il faut entretenir ce dynamisme.

La crise sanitaire est derrière vous…
Sincèrement, je n’avais jamais connu un tel engouement. On a relancé un Championnat honneur qui avait disparu il y a quatre ans. Cinq clubs se sont engagés. Des joueurs qui avaient abandonné sont revenus. Notre objectif, c’est que les clubs se structurent. Derrière, automatiquement, des joueurs ou joueuses issus des clubs vont atterrir dans les Pôles.

Quels rôles jouent-ils dans ce renouveau ?
Un rôle essentiel. Le niveau en Guyane est en train de croître. Les Championnats sont beaucoup plus intéressants. Ce n’est pas seulement dû aux Pôles, mais l’outil permet de mieux former les athlètes qui vont ensuite densifier les compétitions locales.

Fournir des joueurs aux différentes équipes de France n’est-il pas un autre objectif ?
Non. Notre objectif est de former des cadres, proposer une formation digne de ce nom, et faire en sorte qu’elle soit le moteur de toute notre activité. Nous sommes fiers d’avoir Roan Safel ou Fransceschesline Atenessy en équipe de France de beach. Mais chaque chose en son temps… Notre handball est amateur, mais le travail accompli doit être assimilé à un travail de professionnel.

Que vous partagez dans la ZAG…
Le travail entrepris dans la zone Antille/Guyane est très important. Travailler à trois est toujours plus porteur que travailler seul. Avec les collègues de Martinique et Guadeloupe, nous avons bien compris l’intérêt de cette collaboration en restant bien sûr vigilant par rapport à nos différences. Mais les stages avant les Interligues ou les Interpôles que nous effectuons à tour de rôle sur l’un ou l’autre des territoires amènent une plus-value évidente. C’est valable pour les joueuses et les joueurs comme pour les JAJ.

Propos recueillis par Philippe Pailhoriès

FICHE TECHNIQUE
Président : Paul Polydore
Responsable Pôle Espoir filles : Gwenaël Marie
Responsable Pôle Espoir garçons : Richard Bignon
Joueuses issues du territoire : Agathe Alaïs, Béatrice Edwige, Ananda Garain, Celiane Ringuet, Laetitia Saibou et Fransceschesline Atenessy.
Joueurs issus du territoire : Ludwig Appolinaire, Sébastien Garain, Roan Safel et Luc Tobie.