Bengt Johansson, l’ancien entraîneur et joueur suédois est décédé dimanche dernier, à l’âge de 79 ans. À la tête de l’équipe masculine de 1988 à 2004, le technicien suédois incarne la réussite du handball suédois. Entraîneur de l’équipe de France de 1986 à 2001, Daniel Costantini lui rend hommage.

Quadruple champion d’Europe (1994, 1998, 2000 et 2002), double champion du monde (1990 et 1999), Bengt Johansson a également remporté trois médailles d’argent aux Jeux olympiques (1992, 1996 et 2000) pour bâtir le palmarès le plus imposant d’une équipe scandinave. Surnommés « Les Bengan Boys » issus du patronyme de leur entraîneur, les Magnus Andersson, Stefan Lövgren, Staffan Olsson et Magnus Wislander, notamment, ont écrit en lettres d’or l’histoire du handball suédois. Une période pendant laquelle les Bleus ont aussi souvent buté sur les Scandinaves (de 1988 à 2001 : 8v, 2n et 19d). L’histoire retiendra que Daniel Costantini a remporté le premier duel face à son homologue suédois lors de la Polar cup en Norvège, le 25 novembre 1988, par 18 à 17 et un jet de 7m de Denis Lathoud. Le mano-à-mano entre les deux techniciens s’achèvera par une huitième victoire, 13 ans plus tard, dans un Bercy incandescent, synonyme de deuxième couronne mondiale des Bleus (28 à 25). « J’ai le sentiment de me retrouver quitte avec les Suédois, après cette superbe victoire à Bercy, sourit Daniel Costantini. Ce fût une fête inoubliable avec ce but à la dernière seconde de Greg Anquetil qui nous a emmenés en prolongations. C’était presque un scénario de film. »

Un homme exceptionnel
« J’ai eu la chance de rencontrer Bengt un peu plus intimement dans le cadre de colloques et de séminaires. Nous avions des caractères différents, lui le Suédois de Halmstad et moi le Marseillais, raconte Daniel Costantini un brin nostalgique. C’était un homme charmant, un type entier qui m’inspirait le respect. Il avait des idées avant-gardistes dans le management des hommes. Moi j’étais un adjudant-chef insupportable – avec mes joueurs je n’avais pas le choix si non je serais mortmais Bengt misait déjà sur le management participatif. Il m’impressionnait par la gestion de son équipe, je l’enviais. Ses joueurs exerçaient quasiment tous à l’étranger et avaient le respect du métier, le devoir aussi de prouver tous les jours leur valeur pour mériter leur salaire. Bengt était un mec exceptionnel, c’est aussi pourquoi il a duré si longtemps. » Le Marseillais revisite ses souvenirs jusqu’au Mondial 90 en Tchécoslovaquie – celui où la France s’est qualifiée pour les J.O. de 1992 – et revient sur cette anecdote : « deux jours avant la finale, nous croisons, dans le hall de l’hôtel, l’équipe de Suède au grand complet vêtue de smoking. Il se rendait à l’opéra de Prague ! » n’en revient toujours pas celui qui fêtera cette année le 30e anniversaire de la première médaille olympique.

Daniel Costantini le 4 février 2001 lors de la finale du Mondial, face à la Suède. (Photo FFHandball / S.Pillaud)

L’héritage du jeu
« Le jeu de la Suède était impressionnant car complètement équilibré, pas un poste n’était sacrifié. On pouvait alors entendre que Costantini ne savait pas utiliser les ailes avec ses mouvements offensifs uniquement pour les arrières, ce n’est pas tout à fait vrai, exhume le coach marseillais. Les Suédois développaient un jeu complet avec les ailiers qui couraient comme des lapins et qui étaient de bons finisseurs, aussi des supers arrières. Il y avait également le jeu autour du pivot, notamment avec Wislander. Avec ce jeu, en acier trempé, rien ne pouvait leur arriver. » Vice-championne du monde en 2020 puis championne d’Europe en janvier dernier, la Suède a retrouvé son lustre d’antan. « Lorsque tu vois jouer la Suède aujourd’hui, il existe indiscutablement des liens de ce qui pouvait être réalisé à l’époque. C’est la même culture du jeu, un jeu très académique et très bien léché, avec des ailiers exceptionnels qui réussissent partout en Europe. »

Hubert Guériau