Ils sont les deux artificiers attitrés des jets de sept mètres. Guillaume Joli et Paule Baudouin attachent la plus grande importance à leur rôle de tireurs de penalties en équipe de France. Ils se confient sur leurs secrets du jet de sept mètres.


« -Paule, Guillaume, comment percevez-vous votre rôle de tireur n°1 des penalties sous le maillot bleu ?
Paule : -C?est venu tout seul, à vrai dire, je ne sais même pas pourquoi Olivier m?a désignée comme telle. Ce que je peux dire, c?est que je ne me mets aucune pression. C?est à quitte ou double à chaque fois, en quelque sorte.
Guillaume : -C?est clairement une responsabilité. Dans des matches de très haut niveau, cela peut faire la différence de ne pas rater ces choses-là. Je m?entraîne pas mal à l?entraînement pour en rater le moins possible. J?essaie de me mettre dans des conditions mentales de match, ou en tout cas de m?en approcher le plus possible, pour travailler mon efficacité.
Paule : -Oui, moi aussi il m?arrive de le travailler à l?entraînement. En fin de séance, je demande à une gardienne qui n?est pas trop fatiguée de venir faire quelques tirs.

-Est-ce un exercice mental avant tout, selon vous ?
Guillaume : -Il y a une grosse partie mentale, mais aussi technique. C?est plutôt un jeu entre le gardien et moi, on essaie de se lire l?un et l?autre, de se faire tourner en bourrique, de masquer des trucs?
Paule : -Je prends également cela comme un jeu entre la gardienne et moi, mais sans jamais me poser de questions.

-Prend-on du plaisir à tirer un penalty ?
Guillaume : -Bien sûr. Le fait de marquer procure du plaisir, mais également le jeu avec le gardien qui précède.
Paule : -Je suis d?accord, il y a une forme de pression dans le duel avec la gardienne qui donne du plaisir.

Guillaume Joli : « Une dizaine de variantes de tirs »
-Combien de sortes de tirs possédez-vous dans votre arsenal ?
Paule : -Je ne sais pas trop? Disons que j?ai deux tirs favoris, l?un en bas sur ma gauche, l?autre en haut, en lucarne du côté de mon bras de tir (le droit). Ce qu?il y a de sûr, c?est que je n?ai pas la roucoulette dans mon registre, je ne sais tout simplement pas la faire.
Guillaume : -Je dois avoir une dizaine de variantes. Certaines sont préférentielles et plus utilisées que d?autres, bien entendu. Mais on est obligé de varier, car les gardiens font beaucoup de vidéo?

-Certains penalties sont-ils plus difficiles à mettre que d?autres ?
Paule : -Je pense qu?ils sont tous aussi difficiles les uns que les autres. Parfois le troisième est plus important que le sixième, donc la succession de penalties manqués ou réussis ne change pas grand-chose à l?affaire. Après un échec, si je retourne sur la ligne des sept mètres avec l?idée de vengeance dans mon esprit, je vais louper à nouveau. Mais ça ne me pose aucun problème d?y retourner, même après un échec, car j?y mets la même rage.
Guillaume : -Moi non plus ça ne me dérange pas d?y retourner. On se parle souvent avec Mika (Guigou). On se gère en fonction des sensations de l?un et de l?autre, selon qu?on se sent d?y aller ou pas, selon le moment du match. L?entraîneur a décidé à la base de faire de nous les tireurs, mais ensuite il n?intervient que si on a, par exemple, échoué tous les deux avec Mika. Je ne pense pas que ça devienne de plus en plus difficile de les marquer au fur et à mesure du match. Au contraire, quand tu en as rentrés trois ou quatre, si tu ne te déconcentres pas, ça devient plus dur pour le gardien car tu as pris l?ascendant psychologiquement. Les trois-quatre premiers sont les plus durs.

-Quels sont les penalties les plus importants que vous ayez marqués sous le maillot bleu ?
Paule : -Franchement je n?ai pas de souvenir précis. Ils le sont tous autant les uns que les autres.
Guillaume : -Tous le sont, c?est vrai. Mais je dirais que les deux que j?ai marqués dans la dernière minute contre l?Espagne à l?Euro 2010, et qui nous ont permis de faire match nul, sont peut-être les plus importants.

-Avez-vous déjà tenté quelques fantaisies sur la ligne des sept mètres ?
Guillaume : -Non, je n?ai jamais essayé de 360° par exemple (un tour sur lui-même avant de tirer). Les meilleurs pénos sont ceux qui rentrent !
Paule : -J?ai déjà essayé le tir main gauche, mais je ne sais plus si c?était en match ou à l?entraînement. Je me souviens aussi d?un chabala sur Dinu, la gardienne roumaine aux Jeux de Pékin en 2008. C?est la gardienne qui nous mettait la misère depuis plusieurs années, et ce jour-là elle ne m?a rien arrêté, pas même le chabala?

-Pour terminer, vous avez surement rêvé au moins une fois de tirer un penalty à la dernière seconde d?une finale mondiale ou olympique, n?est-ce-pas ?
Paule : -Sincèrement, non?
Guillaume : -Oui, bien sûr que j?y ai déjà pensé ! J?ai même rêvé que je le marquais ! »