À la tête du pôle espoir de Lyon, Guillaume Joli est le nouvel entraîneur de l’équipe de France U17 masculine après Pascal Person qui est monté d’un cran avec la sélection U19. Le triple champion du monde, double champion d’Europe et champion olympique, se confie sur ses nouvelles responsabilités.

Après deux saisons perturbées par la crise de la Covid-19, cette 3e année avec le pôle devrait être plus réjouissante, non ?
Mon arrivée au pôle correspond au début de la crise sanitaire. Les jeunes ont manqué les interpoles puis les interligues. Alors, je suis très heureux que le handball ait repris et que les jeunes joueurs en formation pendant la semaine puissent s’exprimer en compétition, avec leurs clubs respectifs, lors des week-ends. C’est très bien de s’entraîner, mais disputer les matches, c’est la raison pour laquelle on pratique l’activité handball.

Et toi, en tant que coach, as-tu ressenti de la frustration pendant la pandémie ?
Nous avons eu la chance, dans les pôles, de faire partie du public dérogatoire et de pouvoir continuer à nous entraîner. C’était frustrant de ne pas voir appliquer en compétition le travail réalisé. Franchement, je me suis plutôt mis à la place des joueurs pour lesquels cette situation était difficile. Pour ma part, j’ai pu parfaire ma formation sur plein de points. Cette période est passée hyper rapidement.

Quelle formation évoques-tu ?
J’arrive en équipe de France U17 avec beaucoup d’humilité. Même s’il existe des points communs, le métier de joueur et celui d’entraîneur sont différents. J’ai encore des choses à apprendre même si quasiment tout au long de ma carrière professionnelle, j’ai entraîné des jeunes. C’est tout de même différent d’entraîner une fois par semaine plutôt que tous les jours. La relation de confiance est à installer entre l’entraîneur et les joueurs. Surtout, je mesure la chance d’avoir passé mes diplômes pendant ma carrière, cela permet de gagner du temps sur toutes les choses à mettre en place.

Justement, comment t’inscris-tu dans le PPF masculin avec la responsabilité de la sélection U17 ?
C’est un honneur et une immense fierté. Je me suis retroussé les manches. J’ai passé l’été à réfléchir au projet que j’allais mettre en place. Je tiens à remercier la fédération car je suis très bien accompagné avec Pascal Bourgeais, Pascal Person, Yohann Delattre, Jacky Bertholet et Guillaume Gille. Tout le monde m’aide, s’entraide, et fait en sorte que cela se passe bien. J’ai de la liberté tout en étant accompagné. Je ne pouvais pas rêver mieux et j’ai maintenant hâte que cela commence avec le premier rassemblement prévu au mois de décembre.

As-tu reçu des consignes, un modèle à décliner ?
Il n’y a pas de volonté de tout bouleverser alors je n’ai pas de pression, et je suppose qu’on me fait confiance. Je m’appuie beaucoup sur l’expérience de Pascal Person et de Yohann Delattre. La filière française fonctionne et tout n’est pas à réinventer. Je vais donc m’inscrire dans la continuité car il n’y a pas de volonté de bouleversement. Avec mon parcours en tant qu’homme et joueur, j’apporterai des petites touches, au coup par coup.

Tu vas travailler avec un staff expérimenté…
En effet, ils étaient auparavant aux côtés d’Éric Quintin sur les U19 avec forcément une grosse expérience internationale et du vécu ensemble. Nous allons prendre nos marques, mais je les connais déjà tous, notamment le staff médical qui est Lyonnais ou encore Patrick Passemard qui était CTS sur Lyon lorsque j’étais gamin.

Quels sont les autres interlocuteurs avec lesquels tu collabores ?
Philippe Schlatter, Gaël Michaud, Patrick Passemard, Arnaud Villedieu, Yohann Delattre travaillent sur le groupe de sélection. Ils ont notamment suivi les interligues début octobre, ce qui nous a permis de rassembler 37 joueurs appelés en stage à Besançon lors des dernières vacances de la Toussaint. J’ai eu le bonheur d’être à nouveau papa dès le début de ce stage donc ils ont été encore mis à contribution. De ce groupe, nous avons retenu 18 joueurs pour le premier stage et le tournoi en Espagne. Au terme des deux saisons, l’objectif sera de livrer la photographie la plus claire possible de la génération 2006-2007 afin que l’entraîneur des U19 puisse préparer l’Euro.

Comment as-tu suivi les Jeux olympiques l’été dernier ?
J’étais en vacances et j’ai vibré ! Pour la première fois, j’ai suivi la compétition en étant très focalisé sur le jeu. J’ai aussi suivi l’Euro U19. Je pense qu’il faut réfléchir à ce qu’il se fait au-dessus, pour travailler sur le niveau en-dessous. Notre sport avait besoin de cette réussite, de ces deux titres inespérés. C’est génial pour la discipline, car plein de gamins arrivent dans les clubs et cela relance une belle dynamique. Hormis mes deux compagnons du syndicat des ailiers, Luc et Michaël, l’équipe est jeune et beaucoup seront encore présents en 2024. Ils ont dû passer des moments magiques sur le terrain et s’éclater. Je suis aussi très content pour mon pote Vincent Gérard, qui fait partie de ceux qui ont bien remis l’église au milieu du village.

Quel regard portes-tu sur la réussite de ton ex-coéquipier et camarade de sélection, Guillaume Gille ?
Arrivé sans expérience, prendre ainsi les commandes du Boeing et le poser sur le toit de l’Olympe, franchement chapeau ! Il avait déjà une carrière exceptionnelle en tant que joueur et maintenant à la direction des A, respect !
Effectivement, on s’entend bien et cela nous permet d’échanger librement. La réussite des A est bien évidemment intéressante pour la filière, notamment en ce qui concerne l’animation d’un groupe. Cela apporte des pistes de réflexion.

Quelles sont tes inspirations sur l’aspect technique ?
Je me sens riche d’avoir rencontré des entraineurs avec des profils particuliers, des techniciens étrangers et français. Cela ne surprendra personne, mais j’ai été marqué par mon passage en Espagne. Juan Carlos Pastor m’a fait changer ma vision du handball. Outre l’influence espagnole sur l’aspect tactique, je retiens aussi le physique et la créativité côté français. Le jeu sur grand espace proposé par les Danois et les Suédois est aussi inspirant. J’espère proposer ainsi le handball le plus efficace et le plus sympa possible. L’aspect mental me fascine aussi.

La définition des rôles a été relayée par les joueurs comme un facteur de réussite aux Jeux olympiques. Tu as bien connu cette situation aussi lorsque tu étais international. Quelle est ta philosophie en la matière ?
Lorsque Claude Onesta disposait des sept meilleurs joueurs du monde, il avait bien identifié les rôles de chacun. C’est certain que cette année aux J.O.  Il y a eu plus de turnover. La définition des rôles est super importante, mais le management des jeunes joueurs en formation est différent de celui avec des professionnels. Avec les jeunes joueurs, il convient peut-être de leur apprendre à manier plusieurs rôles et à partager les responsabilités.

Propos recueillis par Hubert Guériau