Ce lundi, Guillaume Gille revient sur le stage de l’équipe de France masculine qui a rassemblé jusqu’à 22 joueurs. Privés de matches, les Bleus ont posé les premières pierres du nouveau projet partagé avec le staff.

48h après la fin du stage, quelle image retiens-tu de cette première semaine à la tête des Bleus ?
Deux images me traversent lesprit. Avec Tchouf (Cédric Sorhaindo) et Mika (Michaël Guigou), il y a eu ce moment particulier entre deux des plus beaux représentants du handball français qui tous les deux restent au service de l’équipe de France. Le premier en prenant de la distance, le second en endossant dautres responsabilités pour les mois à venir. Ce qui ma marqué cest leur état desprit et leur volonté de se retrouver ensemble : ces deux garçons incarnent parfaitement les valeurs de l’équipe de France. Ensuite, la deuxième image, cest le groupe en dehors des séances dentraînement avec par exemple des parties acharnées de ping-pong et de billard. À lintérieur de cette bulle sanitaire, la vie a été particulièrement riche avec beaucoup d’énergie et d’échanges.

Et quel regard portes-tu sur une autre image, qui peut certes sembler anecdotique, ce sont tous ces garçons patientant à lentrée du restaurant les Experts, avant les repas ?
Il y a cette idée de retrouver de la cohésion et un état desprit pour la performance. Cela peut se traduire par ce groupe qui, avant de démarrer le repas, attend que tout le monde soit là. Cest en effet un petit clin d’œil qui montre le soin quont pris les cadres de ce groupe à driver les petits jeunes et ceux qui revenaient après des absences plus ou moins longues.

Tu as aussi choisi de débuter le stage par une méthode originale en constituant des petits groupes. Peux-tu détailler les objectifs ?
Jai souhaité remettre lensemble du groupe, staff et joueurs, dans le projet et au service du projet. Cette séquence dintroduction a servi à cela : en réunissant par petits groupes des éléments du staff et des joueurs, jai souhaité embarquer tout le monde dans le même bateau. Ce fut un moment important où chacun a pu sexprimer et démontrer que la parole de chacun compte. La capacité de chacun à contribuer, à écouter, à interagir et à partager doit sillustrer dans toutes les séquences.
Cest cet état d‘esprit ce que suis venu chercher car le projet Tokyo 2021 nécessite des joueurs et des membres du staff très dynamiques et acteurs du projet.

Quels ont été les axes de travail lors de cette semaine de stage ?
Dépourvue de matches officiels, cette première semaine de stage a permis de poser le cadre opérationnel du nouveau projet présenté depuis de longs mois aux joueurs, et de le faire vivre à la fois dans lorganisation du travail, de la vie en équipe de France comme dans le fonctionnement des différents cercles au sein du groupe. Ces idées et ces nouveautés ont permis de déployer ce projet et de le rendre concret afin que les joueurs puissent expérimenter les nouveaux repères de jeu et de vie commune. En somme, mieux comprendre de façon pratique, là où nous souhaitons les emmener.

Peux-tu détailler le travail technique qui a été engagé ?
Plusieurs chantiers ont été ouverts car sans la pression de matches à gagner dans le cadre des qualifications, cela nous a permis déjà daller loin dans la mise en application des principes de jeu, sur lexplication des nouveaux systèmes dans lesquels je vise que l’équipe se retrouve. Il y a bien entendu encore beaucoup de travail. Nous navons pas abordé tous les aspects du jeu car il faut trouver un équilibre entre ce qui évolue, change et ce qui est à stabiliser afin de ne pas s’éparpiller. Nous avons mis l’accent sur la défense et le jeu sur grand espace, avec également un travail dexploration sur le jeu dattaque qui nest pas encore finalisé. Compte tenu des conséquences de la crise sanitaire (joueurs à larrêt, matches reportés), des différences d’état de forme, un travail physique dajustement a été effectué par Olivier Maurelli en lien avec le staff médical.

Finalement les absences liées à la Covid-19 et aux quelques blessures ton conduit à élargir le groupe initialement prévu. Nest-ce pas un scénario qui pourrait se répéter lors du prochain stage, à partir de 26 décembre ?
Oui, nous avons dû complètement reconfigurer le groupe et les objectifs corrélés à cet effectif, puisquenviron un tiers des joueurs navait pas vécu lEuro. Cest en effet particulier dintégrer trois nouveaux joueurs en plus des quatre qui effectuaient leur retour. Je pense effectivement que ce sont les prémices de ce quon verra en décembre avec un groupe qui pourrait être renouvelé à 50 % en raison de la participation du Paris SG HB, du FC Barcelone et de Vezprèm au Final Four de la Ligue des Champions 2020, et du Final Four de la coupe de la ligue de Norvège pour Elverum.

Malgré ces absences, as-tu procédé au debriefing de lEuro ?
Il y avait trop de joueurs absents pour imaginer la mise en place de ce debriefing. Les conséquences de la Covid-19 nous ont fait changer de plan et différents enjeux nont pas pu être traités comme nous le souhaitions.

Finalement, le groupe qui a participé à lEuro est déjà placé dans une forme de concurrence, non ?
Sur les sept joueurs rappelés, six n’étaient pas prévus dans la liste initiale. Louverture de leffectif a généré beaucoup de dynamisme et de fraicheur sur le terrain avec une envie de mordre dans chaque séquence. Les nouveaux joueurs et les autres, plus expérimentés, sont venus avec lidée de saisir lopportunité qui se présentait afin de pouvoir s’évaluer et dintégrer ce groupe France. A lissue de ce stage-là, je lai dailleurs indiqué lors de la réunion finale, chaque joueur a montré de quoi il est capable et sa capacité à sintégrer dans le groupe. Je sais pouvoir faire appel à chacun deux.

Dautres membres du staff ont aussi vécu une première expérience…
Le bilan est à la fois extrêmement positif et à la fois un peu frustrant. Tout ce quon avait construit et imaginé, nous a permis de nous préparer au mieux à cette échéance. Mais les absences d’Érick Mathé et dEmmanuelle Mousset ont été une vraie souffrance car leurs qualités sont très importantes dans la performance du staff. Nous avons tenté de leur faire vivre le stage à distance afin que nous soyons le plus connectés possible, tant lors des réunions que lors des entraînements. La présence de Yohann Delattre, qui a la charge depuis de nombreuses années de la sélection U21, l’échelon le plus proche des A, a fait de lui le candidat idéal pour nous aider car il avait une connaissance dune grande partie des joueurs. Tous les deux, nous nous sommes apprivoisés en douceur. Nos échanges ont été très productifs et je suis vraiment satisfait davoir bénéficié du soutien de Yohann. Il y a encore beaucoup de travail mais cela laisse augurer dune dynamique entraînante pour le groupe.

Quels seront les axes de ton travail dans les prochaines semaines ?
Il y a un travail important de débriefing puis de bilan afin de faire le point sur ce que lon souhaitait obtenir, ce quon a réalisé, les axes du projet, les sujets pas encore approfondis. Lobjectif est dutiliser toute la matière générée par cette semaine de travail pour continuer à préciser le plan de bataille car avec les matches de qualification et le Mondial en Égypte, il faudra être opérationnels très rapidement. Les joueurs seront certainement très sollicités et nous resterons en alerte afin de suivre leur évolution physique et médicale.

Ce premier stage sachève au moment où les enjeux électoraux de la FFHandball battent leur plein, est-ce un sujet de préoccupation ?
Engagés dans une saison primordiale pour le Handball français avec les J.O. en ligne de mire, la perspective des élections fédérales reste naturellement un sujet de notre environnement actuel. Je trouve la situation électorale, malgré les éventuelles conséquences sur le projet actuel de l’équipe de France, particulièrement intéressante. Intéressante pour notre sport et notre fédération tant que s’affrontent les projets, les convictions des hommes et des femmes qui composent ces trois listes pour imaginer l’organisation du Handball de demain. Malheureusement j’ai l’impression que cette campagne place le débat sur le terrain des sujets à polémique, des déclarations gratuites contre les équipes en place, contre l’institution, qui ne grandissent pas l’image de notre discipline, ni des personnes qui portent de telles accusations.

Propos recueillis par HGU