Internationale depuis mars 2019, la jeune Méline Nocandy (22 ans depuis 25 février) compte déjà 14 sélections et un total avantageux de 30 buts. Très attachée à ses racines antillaises, la bondissante guadeloupéenne vise toujours plus haut.

Comment as-tu débuté le handball ?
Toute ma famille a joué au hand et en particulier ma tante, Nathalie Bertrand, qui a disputé les finales nationales ultramarines. Depuis toute petite, j’ai toujours voulu faire mieux que ma tante. C’est pour cela que j’ai pris la direction du club de la Jeunesse des Trois Rivières, dès l’âge de 6 ans.

Le premier de tes trois clubs à la Guadeloupe…
Lorsque j’ai débuté, j’étais la seule fille de ma génération. Je jouais avec les garçons et je me sentais protégée. J’étais attachée à mes amis et je ne voulais pas changer de club car c’est celui de la ville où je suis née. Mais à l’âge de 11 ans, j’étais dans l’obligation de rejoindre un autre club si je voulais continuer à progresser. J’ai pris la direction du club de l’Asup puis de Zayen.

As-tu hésité avec une autre discipline ?
Non, c’est seulement plus tard, vers 15-16 ans, que la question de faire de l’athlétisme s’est posée. Mais le handball est devenu très important. Lorsque je suis arrivée en Métropole, j’ai fait des tests. Il y avait une jeune qui faisait de l’athlétisme et qui avait terminé 2e au championnat de France. J’ai égalé son chrono. Courir vite et voilà !

Tes qualités physiques sont impressionnantes. Comment les cultives-tu au quotidien ?
C’est paradoxal car sur le terrain, je vais peut-être vite, mais dans la vie de tous les jours, c’est tout le contraire. Pas que je sois molle, mais je dors le plus possible. Et pas seulement pour récupérer : j’aime être tranquille. Je procrastine beaucoup et je fais les choses à deux à l’heure. Après ça, on va dire que je suis un stéréotype antillais mais je suis très différente de mes parents. C’est juste moi qui suis comme ça (sourire).

Qui sont les acteurs qui t’ont encouragé à rejoindre la Métropole et le Metz HB ?
C’est en premier lieu le CTS de la Guadeloupe, Francis Malinur, qui m’a suivi dès mes débuts. Il est aussi issu du club des Trois Rivières. Éric Baradat, le « patron », est aussi intervenu ainsi que Yacine Messaoudi qui m’avait prévenu que ce serait difficile. Enfin, c’est ma maman car elle adore Metz HB. Je crois que c’est grâce à la jupe (rire). Si un jour je pars, elle continuera à suivre Metz.

Ce fut difficile de quitter la Guadeloupe et de te soumettre au rythme du pôle puis du centre de formation messin ?
Non ce ne fut pas difficile psychologiquement car je savais pourquoi j’étais partie. En revanche, physiquement, je suis devenue vulnérable. J’avais mal partout et j’ai eu quelques entorses. La charge de travail avait augmenté, la température avait changé et sûrement que je ne me préparais pas bien. Ce sont des leçons.

À Metz, tu as retrouvé les jumelles Kanor…
C’est en effet une chance d’avoir des gens de ma culture à mes côtés. Mais les sœurs Kanor étaient à l’internat alors que j’étais en famille d’accueil. Je résidais chez monsieur et Madame Bompart qui avaient hébergé autrefois Grace Zaadi puis Tamara Horacek. C’était moi la petite dernière.

Lorsque tu penses aux Antilles, tu songes à…
La cuisine surtout ! C’est très important pour moi. Je le dis avec humilité mais pour moi les Antilles, c’est le top niveau. À la Guadeloupe, nous avons des rivières, un volcan, des plages de sable noir, blanc et marron.  Je me suis fait tatouer des éléments de ma culture sur mon avant-bras gauche. Un Ka pour jouer du Madras, écrit en toutes lettres Orijin, des plantes, des biscuits… Je suis hyper fière d’être guadeloupéenne. C’est aussi pour cela que j’espère ne pas décevoir ceux qui me suivent.

Outre Orlane Kanor qui fréquente l’équipe de France depuis maintenant trois ans, Jannela Blonbou est aussi régulièrement convoquée…
Je connais Jannela depuis l’âge de mes onze ans. Et toute ma vie, je me souviendrai de notre première rencontre. J’étais sur mon vélo et une voiture ralentit à ma hauteur : c’était Jannela et sa maman qui cherchaient le gymnase des Trois Rivières pour participer à une journée de sélection à laquelle je me rendais aussi. Je leur ai dit de me suivre et je les ai guidées jusqu’en bas de la ville. Depuis, nous sommes inséparables.

Quel regard portes-tu sur votre parcours dans les équipes de France jeunes ?
Au début, c’était difficile car nous avons changé d’entraineur : Laurent Puigségur a remplacé Christophe Caillabet. Lorsqu’on est jeune, on pense qu’on va tout gagner car il y a une forme d’insouciance. Puis il y a eu ce titre européen avec Éric Baradat, et ça, on ne pourra jamais nous l’enlever. Ensuite, on s’est troué au Mondial et je ne sais pas réellement pourquoi. J’étais capitaine et j’avais la certitude que l’équipe pouvait aller loin en dépit des blessées ou des absentes. Ma génération, c’est vraiment du lourd. Chacune avait son caractère. J’aime toutes les filles de cette équipe.

Qu’as-tu pensé au moment au Olivier Krumbholz t’a sélectionnée la première fois, il y a tout juste un an ?
J’étais contente d’être là mais j’avais peur de tout gâcher car si j’ai des qualités, cela ne fait pas tout. J’avais peur de ne pas mettre les arrières dans de bonnes dispositions ou de perdre des ballons dans des bonnes situations. La crainte de mal faire est rapidement sortie de ma tête et je crois que cela s’est plutôt bien passé. J’étais contente d’être là et je suis restée calme. Jouer sans précipitation tout en gardant de la spontanéité, c’est mon défi.

Quels-les sont tes modèles dans le handball ?
Lors du Mondial 2017 masculin en France, j’ai beaucoup apprécié le Slovène Miha Zarabec. Il joue avec de la vitesse et des feintes. De façon générale, je n’ai pas d’idoles mais j’aime prendre un peu de chez chacun-e pour me construire. Je m’inspire notamment de Grace Zaadi et de Stine Oftedal.

Penses-tu aux Jeux olympiques de Tokyo chaque matin ?
Sincèrement, même si cela peut être mal pris, l’équipe de France ne représente que 10 % de l’activité. Mais pour l’atteindre, je dois tout donner pendant les 90 % de mon temps avec le club. Être obsédée par les J.O. ne sert à rien. Je ne peux pas me construire seulement autour de ça. En revanche, si je m’entraîne bien au quotidien, si je joue bien avec Metz, alors cela deviendra une priorité.

Après l’échec du Mondial au Japon, une nouvelle page s’ouvre avec le rassemblement du mois de mars, à quatre mois seulement des J.O. ?
Cette première compétition majeure avec les Bleues fait désormais partie de mon histoire. J’estime que toute équipe est vouée à l’échec après 4-5 ans car c’est difficile de rester au plus haut niveau. Avec Metz, on fait des trucs extras depuis plusieurs années et dès que l’on baisse un peu, pendant quelques semaines, tout le monde en parle. J’ai la chance d’être présente au stage de mars et il faut maintenant rebondir.

HGu