Membres éminents de l’association Handvision, Monique et Jean-Daniel Ledieu, font partie des acteurs bénévoles des grandes compétitions internationales depuis maintenant cinq années. Derrière leur écran, ils délivrent les images qui aident les arbitres à prendre leurs décisions. Après le tour préliminaire à Trondheim, ils officieront à Stockholm pour la phase finale de l’EHF EURO 2020.

Quel est votre parcours dans le handball ?
Ce n’est pas notre niveau sportif qui a guidé notre parcours (Monique a joué au niveau régional, Jean-Daniel en départemental). En revanche notre fille aînée, Marion, a joué à un bon niveau, au Mérignac HB, lorsque Thierry Vincent en était l’entraineur, dans les années 2000. C’est ainsi que nous avons découvert le haut niveau. Nous nous sommes intégrés au club et lorsqu’il a fallu trouver des bénévoles pour Handvision, nous avons débuté la prise des statistiques.

Aviez-vous déjà une expérience en la matière ?
Nous avons plutôt l’esprit matheux tous les deux. Nous avons été formés par Armand Steiger (créateur de Handvision) puis, c’est sur le tas, que nous avons poursuivi notre formation. Nous trouvions intéressant d’analyser le jeu et d’aider les entraîneurs.

Et pas seulement…
La gardienne de Mérignac, Stella Joseph-Mathieu, était en effet avide de statistiques. Elle nous demandait de lui imprimer, à la mi-temps, les statistiques des joueuses adverses.

À quel moment, votre collaboration a-t-elle pris un tournant international ?
Armand Steiger a commencé à développer la Goal-Line Technology. Et c’est lors du Final Four de la coupe EHF organisé à Nantes 2013, que nous sommes intervenus la première fois. Sur le premier jet de 7m des Nantais (tiré par Valero Rivera) face aux Allemands de Rhein-Neckar Lowen, l’arbitre a fait appel à la vidéo pour vérifier si le ballon avait bien franchi la ligne. L’arbitre biélorusse a validé le but juste à côté de nous, avant de le valider à nouveau sur le terrain. Il s’agissait de la première utilisation de la Goal Line Technology sur une compétition officielle.

Puis les championnats internationaux se sont succédés…
Nous avons débuté avec le Golden Globe organisé au Qatar avant d’enchaîner par les championnats du monde masculin (Qatar 2015) et féminin (Danemark 2015) puis les championnats d’Europe, à partir de 2016.

Avez-vous un souvenir marquant d’une décision rendue après l’usage de la Goal Line Technology ?
Lors du Mondial au Qatar au 2015, nous avons officié sur la phase de poules et la coupe du président.
En toute fin de match de Biélorussie – République tchèque, le score est à égalité, les Tchèques tirent un jet franc. La Goal Line a déterminé que le ballon n’avait pas franchi la ligne. Le but est refusé et finalement la République tchèque s’imposera aux tirs aux buts.

Quels sont les moments clefs d’un match où vous êtes sollicités ?
Il existe quatre situations qui sont clairement définies :
1/ Goal Line technology
2/ Confirmation de carton rouge (ou pas)
3/ Vérifier un changement
4/ Usage intempestif du Buzzer
Quelle que soit la situation retenue, la demande doit être effectuée dans un délai d’une minute.

Outre votre rôle qui peut être décisif pendant le match, quelles sont les autres tâches à effectuer ?
Nous devons installer les trois caméras de la Goal Line Technology sur chaque but. Avec la pose des câbles et des serveurs vidéo, en fonction des salles et des difficultés, nous comptons jusqu’à 4h pour l’installation. 2 caméras supplémentaires (sur la zone de changement et le buzzer) sont également installées. Avant chaque match et à la mi-temps, nous vérifions que tout fonctionne. Il est déjà arrivé que notre système soit débranché… Quelqu’un voulait recharger son téléphone portable…

Votre position, au plus près du terrain, est envieuse. De plus, vous êtes régulièrement visibles à la télévision…
C’est une forme de récompense. Mais derrière notre pupitre, nous restons neutres. Nous faisons partie du staff de l’EHF et nous sommes concentrés sur notre mission. À chaque passage TV, on reçoit des messages de nos amis qui nous demandent de sourire. Bon, on ne se voit pas forcément passer à la TV, nous sommes seulement concentrés.

Quelle est la répartition des tâches entre vous deux ?
Monique : je me concentre sur les aspects techniques, sur la fourniture des images.
Jean-Daniel : je m’occupe plutôt du terrain et du ressenti de la salle.

Est-ce parfois source de tension entre vous ?
Non, on ne peut pas s’engueuler là-dessus. Parfois, c’est le délai de fourniture des images, si nous le jugeons trop lent, qui anime le débat après le match. Nous avons en effet pour objectif de fournir les images aux arbitres le plus rapidement mais nous sommes tributaires des images de la TV.

La collaboration avec les arbitres et les délégués est-elle harmonieuse ?
Dans les premiers temps, nous avions observé une certaine défiance des arbitres. Ils pensaient qu’on les surveillait. Au fil du temps, les arbitres ont commencé à apprécier les outils d’aide à la décision. Désormais tout se passe avec les arbitres et les délégués.

Combien de fois avez-vous été sollicités lors du tour préliminaire à Trondheim ?
En moyenne, une ou deux fois par match. Il y a eu un cas atypique. Lors du match entre la France et la Bosnie-Herzégovine, il y avait un doute sur un but inscrit par Elohim Prandi. Mais, en réalité, son tir était passé au-dessus de la cage. Le but n’a pas été validé après consultation des images.

HGu