Affecté, à l’instar de ses amis arbitres, par la disparition de Thierry Dentz, Olivier Buy évoque le secteur de l’arbitrage et ses différentes missions.

La disparition de Thierry Dentz marque-t-elle la fin d’une époque ?
Oui assurément. C’est la fin de l’arbitrage champagne. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère. 75% du groupe élite a été renouvelé et je remarque que si l’approche est plus professionnelle, l’ambiance n’est plus tout à fait la même. Nous avons perdu en camaraderie et en convivialité. Cette évolution est conforme avec la société dans laquelle nous évoluons. Dans les années à venir, je crains que les arbitres ne se rendent plus au salon VIP après les matches.

Les enjeux sont grandissants et le secteur professionnel est légitiment demandeur d’un arbitre le plus professionnel possible. Pour les jeunes arbitres, la pression n’est-elle pas trop importante ?
En effet et c’est pourquoi lorsque les jeunes binômes arrivent dans l’arbitrage, quelles que soient leurs compétences, ils ferment les verrous et ils manquent de communication. Le pli a été pris depuis 2 à 3 saisons en LidlStar Ligue. Mais je remarque qu’avec de l’expérience, cela évolue positivement. Je pense notamment aux frères Gasmi qui se sont assouplis car ils font preuve maîtrise.

Comment conserves-tu alors l’envie de siffler ?
Tout simplement le plaisir. Quand je vois comment la maladie a emporté Thierry, cela ne peut que renforcer l’idée qu’il faut prendre du plaisir. Plus on vieillit et plus on est proche de la fin, plus on savoure. Le dimanche 27 janvier, le secteur de l’arbitrage était réuni et nous lui avons rendu hommage. Je dois avouer que j’ai encore du mal à réaliser qu’il est parti.

Après avoir connu le plus haut niveau international avec Gilles Bord et notamment deux tournois olympiques, est-ce difficile de s’en tenir aux compétitions nationales ?
Non pas du tout. Je ne ressens aucune frustration. Nous avons connu une belle carrière et aujourd’hui le contexte international ne me manque pas. Il faut aussi savoir passer la main.
Surtout, professionnellement, je ne pourrais plus permettre de m’absenter plusieurs jours : je ne bénéficie plus, au sein de la Police Nationale, d’un aménagement pour le haut niveau.

Quelle sont aujourd’hui tes missions ?
Depuis 2012, je suis toujours arbitre élite avec mon binôme Sébastien Duclos.  J’ai plusieurs missions qui me passionnent : je suis membre du CA de la FFHandball, membre de la commission de discipline du comité 95 et représentant des arbitres à la LNH. J’anime également les stages de formation des délégués, avec Alain Desplaces.

Un arbitre qui forme les délégués ?
Avec mon expérience, j’apporte ma touche technique lors des formations. Cela concerne l’approche au niveau du terrain. Je leur fais part de mon approche et comment, selon moi, les délégués doivent réagir. Nous ne sommes pas toujours d’accord mais cela permet d’ouvrir des débats. Je suis aussi en charge du tutorat de jeunes binômes.

En quoi le rôle de délégué est-il difficile à appréhender ?
C’est un rôle compliqué. Le délégué doit être, en quelque sorte, un amortisseur des décisions des arbitres. Il amortit les contestations au niveau des bancs car, le plus souvent, les entraîneurs se tournent vers le délégué. Avec les arbitres, il s’agit d’un travail d’équipe qui nécessite une corrélation entre les acteurs. Le délégué doit apporter son soutien aux arbitres et faire autorité. C’est un vrai plus pour les jeunes binômes.

Quel est ton ressenti sur les nouvelles règles ?
L’engagement rapide est bénéfique pour le jeu ainsi que pour les arbitres. Le joueur a plus intérêt à se replier qu’à contester. Globalement, cela atténue les contestations. En revanche, j’estime que les règles dans les 30 dernières secondes sont peu compréhensibles et rendent la gestion du money-time plus compliquée que par le passé.

Quel regard portes-tu sur la dernière action de la finale du Mondial féminin 2019 entre les Pays-Bas et l’Espagne ?
Ce n’est pas mon style de polémiquer surtout que Charlotte et Julie Bonaventura ont parfaitement appliqué le règlement. Elles ont été courageuses de prendre cette décision pas facile. Mais je trouve dommage qu’un un titre mondial se joue sur un tel fait de jeu.

Que penses-tu de l’usage de la vidéo dans l’arbitrage ?
J’estime que la vidéo devrait être utiliser uniquement pour les décisions qui entraînent un carton et des actions exceptionnelles qui posent problèmes, notamment en toute fin de match si l’écart au score est minime. Je remarque que les arbitres ne changent pas forcément d’avis après consultation de la vidéo.

HGu