L’entraîneur de l’équipe de France se satisfait de la qualification pour l’EHF EURO 2022 obtenue dès la 4e journée, avec quatre victoires de rang. Il revient sur le match disputé à Toulouse et évoque la suite de la saison.

Quelle est ton analyse du match remporté à Toulouse dimanche soir ?
L’ambiance était super. C’est formidable de jouer dans une salle pleine. Nous avons fait un bien meilleur match que jeudi. Les Croates jouaient sans pression : elles s’accrochent bien et elles sont très opportunistes. Nos joueuses ont fait des performances nettement supérieures. Nous aurions pu réaliser un meilleur match à condition de mieux maîtriser Ivana Kapitanovic qui a fait un très bon match. N’oublions pas que nos gardiennes ont aussi été bonnes, donc cela s’équilibre.

Le score de 27-19 est finalement sans appel…
L’équipe de France est restée sérieuse jusqu’à la fin, ce qui a permis de réaliser un score large après un match tenu. Il faut continuer à travailler pour que chacune trouve sa place et prenne ses responsabilités. Nous sommes au début d’une période et loin encore de notre maximum. C’est normal car nous avons terminé un cycle et nous en débutons un nouveau.

Quel sera le programme de l’équipe de France au mois d’avril ?
Avec ce qu’il se passe en Ukraine, c’est difficile de faire des projets. Il faut tout faire pour jouer face à l’Ukraine mais évidemment cela dépasse le côté sportif. C’est regrettable car les Ukrainiennes ont gagné en Croatie et, en perdant de peu face à nous, elles étaient bien engagées dans ce groupe. Malheureusement elles sont aujourd’hui fauchées par les événements dramatiques. Outre le match en République tchèque, nous voulons absolument jouer un deuxième match. Il nous faudra trouver une équipe disponible. Le cas échéant, nous allons nous rapprocher des autres fédérations européennes pour trouver une équipe qui pourrait jouer avec nous au Havre.

Dès lors où l’équipe de France est qualifiée, comptes-tu solliciter toutes les joueuses pour ces deux matchs de fin de saison ?
Ma responsabilité est de constituer la meilleure équipe possible pour 2024. En France, chacun le sait, nous disposons d’une grande richesse d’effectif. Jusqu’aux J.O. de 2024, nous disposons d’une belle période de 30 mois pour faire progresser des joueuses. Il existe une forte concurrence et je souhaite donner leur chance à des jeunes joueuses pour voir comment leur performance évolue.

En plus des quatre jeunes filles convoquées cette semaine (Floriane André, Sarah Bouktit, Emma Jacques, Oriane Ondono) faut-il s’attendre à la convocation de jeunes joueuses supplémentaires ?
L’objectif est surtout de faire progresser les filles qui sont déjà venues, Floriane André et Emma Jacques en font partie. Sur ces deux matchs face à la Croatie, nous avons notamment fait des essais avec Oriane Ondono et Déborah Lassource. La priorité est de continuer à développer ces joueuses plutôt que d’en solliciter d’autres. Nous avons déniché deux bonnes joueuses, alors je pense qu’il faut continuer à les faire progresser. Oriane Ondono a réalisé des choses intéressantes. Elle a été très engagée dans ce qu’elle a fait, en attaque notamment en défense aussi. En revanche, une jeune fille telle que Sarah Bouktit disputera ceratinement le Mondial U20F au mois de juin.

Imagines-tu mettre au repos certaines cadres ?
L’équipe de France a besoin de travailler. On ne peut pas espérer tirer profit de la semaine d’avril sans cohérence dans la composition du groupe. Il nous faudra travailler sur des associations avec les filles qui ont une chance d’être présentes en 2024. On ne présentera pas une équipe A’. Il faudra aussi faire preuve d’empathie. On ne pourra pas le faire avec tout le monde. On regardera les situations individuelles, sans toutefois déséquilibrer le rapport de force entre les clubs.

Les coupes d’Europe seront alors l’objectif prioritaire de nombreuses internationales…
Avec une forte présence de nos joueuses en ligue des champions – c’est la rançon de la gloire – on ne pourra pas toutes les mettre au repos car elles sont très nombreuses. Peut-être que celles qui en auront le plus besoin, seront mises au repos mais il est certain que l’équipe de France aura fière allure en avril.

Jusqu’à l’EHF EURO 2022 qui débutera dès le 4 novembre (en Macédoine du Nord, au Monténégro et en Slovénie), en raison de la coupe du monde de football disputé en décembre au Qatar, l’équipe de France ne disputera plus de matches officiels. Quels seront les adversaires de la préparation ?
Nous avons un accord avec l’Allemagne pour des matchs lors du premier stage de préparation en septembre. En revanche, pour notre ultime adversaire avant le départ à l’Euro, ce n’est pas encore finalisé.

Comment mobiliser les joueuses sans matchs officiels pendant près de huit mois ?
On ne fera rien de grand en 2024 si les joueuses ne sont pas responsables, si elles ne prennent pas en main leur projet en main et en autonomie pour progresser. Dans ce cadre-là, le partenariat entre la fédération et les clubs est essentiel. Dans les clubs, les joueuses disposent d’un encadrement avec tout ce qu’il faut autour d’elles pour progresser. Nous sommes des petits satellites pour les aider et apporter notre compétence. Celles qui seront sur le terrain en 2024 seront celles qui auront développé le plus de cohérence et d’autonomie dans leur projet. Se projeter sur un tel événement génère de la concurrence et pousse tout le monde à travailler. Nous aurons besoin de joueuses extrêmement investies.

Plus encore dans le secteur féminin, la guerre déclenchée par la Russie va rebattre les cartes, en particulier pour l’équipe russe…
Ce que je retiens aujourd’hui, c’est la souffrance de tout le monde. Ce n’est pas le moment de faire de la politique. Les événements sont tellement incroyables et exceptionnels ; ils vont bien au-delà de l’activité handball. Et en effet comment imaginer que demain des Anna Sen, Daria Dmitrieva, Anna Vyakhireva et d’autres puissent disparaitre complètement du milieu malgré elles ?

Propos recueillis par Hubert Guériau