Enseignant d’éducation sportive et physique pendant vingt-cinq ans à Bouaké, au centre de la Côte d’Ivoire, Michel Baldino a lancé la Côte d’Ivoire vers des sommets en remportant notamment trois Coupes d’Afrique des Clubs Champions.

À 89 ans, sa mémoire est encore infaillible et chaque souvenir égrené ravive une flamme jamais vraiment éteinte. Michel Baldino, alias Konan Moussa, passe ses vieux jours dans le Var. Son esprit hante pour toujours les faubourgs de Bouaké. Là-bas, entre 1962 et 1987, il a façonné une équipe sacrée à trois reprises championne d’Afrique, composée de joueuses qui ont ensuite fait les beaux jours de l’équipe nationale, lauréate de la Coupe d’Afrique des Nation en 1987.

Michel Baldino est né en Algérie. Il aurait pu devenir footballeur professionnel à Toulouse, il a bifurqué vers le handball. Sans trop savoir pourquoi. Ou alors si. « Par accident providentiel », rigole-t-il.

En 1961, la Côte d’Ivoire avait mis en place l’Office Ivoirien du Sport Scolaire et universitaire (OISSU). L’accent porté par Félix Houphouët-Boigny sur la scolarisation, et le déploiement de la politique de coopération menée par la France dans son ancienne colonie a permis à des techniciens français d’encourager la pratique sportive. Michel Baldino a ainsi été envoyé à Bouaké pour diriger le CREPS. A son arrivée, le CREPS n’existait pas. Alors il est devenu professeur d’éducation physique au lycée des jeunes filles de Bouaké, un établissement à vocation sportive et studieuse. « Le handball correspondait bien au profil physique des jeunes filles », justifie-t-il.

Namama Fadiga est aujourd’hui la directrice exécutive de la Confédération Africaine (CAHB). (Photo FFHandball / J.Schlosser).

Avec l’ASC Bouaké Abinader, il a créé une famille qui a tout raflé. Mais il a surtout permis à des joueuses de devenir des femmes exemplaires qui occupent aujourd’hui des postes à responsabilité dans la société ivoirienne. « Michel Baldino, résume Namama Fadiga, capitaine de la sélection entre 1987 et 2000, c’est mon papa, le papa de toutes les filles. »

Namama Fadiga a longtemps été chargée d’études, puis directrice de la communication et des archives au Ministère de la Jeunesse, des Sports et Loisirs. Elle est aujourd’hui vice-présidente du Comité National Olympique de Côte d’Ivoire et Directrice Exécutive à la Confédération Africaine de Handball (CAHB). L’une de ses complices de Bouaké, Mariam Koné, est, elle, directrice générale de l’Office National des Sports et a notamment la charge de l’organisation de la CAN 2023 de foot. Le parcours de Kandia Camara est plus édifiant encore. Ministre de l’Education Nationale, de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle entre 2012 et 2021, elle est désormais Ministre des Affaires Etrangères, de l’Intégration Africaine et de la Diaspora, soit la n°2 du Gouvernement d’Alassane Ouattara. « Nous ne serions rien sans Michel Baldino, affirme Mariam Koné. Il a d’abord mis en place une Section Sports-Etudes, il nous a réunies dans un même dortoir, puis il nous a offert des cours de rattrapage lorsque nous en avions besoin. Il ne nous a jamais lâchées. Il allait dans les classes voir si nous étions en train de réviser, il nous payait même nos boites de pilules tout en nous éveillant à nos vies de femmes. Je ne sais pas s’il a donné à ses enfants autant qu’il nous a donné. » « Il était aussi exigeant sur les résultats sportifs que scolaires, appuie Namama Fadiga, et il n’hésitait jamais à nous mettre en quarantaine si nous ne répondions pas à ses attentes. Il nous a tout appris. Jouer. Travailler. Sourire. »

Michel Baldino est fier de leur parcours. Il n’a oublié aucune de ses filles : Désirée Krabo, la directrice de la piscine d’état. Massandjé Touré, Emilie Djoman, Elizabeth Zomi… Il n’a rien oublié de cette drôle d’époque avec ses drôles de dames…

Philippe Pailhories

Kandia Camara, la Ministre des Affaires étrangères, n’hésite jamais à consacrer un peu de son temps à la discipline dirigée par Aboubacar Karaboué. (Photo FFHandball / J.Schlosser).

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