Entraîneur de l’équipe de France masculine depuis 1985, ce dimanche 04 février 2001 Daniel Costantini dirige une dernière fois ses joueurs qu’il a sorti de l’ombre pour les porter à la lumière incandescente de Palais Omnisports de Paris Bercy en fusion. Le Marseillais entre définitivement au panthéon des grandes figures du sport français en décrochant un second titre mondial avant de tirer sa révérence.

Quel souvenir conserves-tu de ce titre remporté en France ?
Je ne peux naturellement pas l’oublier : c’est l’image la plus forte de ma carrière et le moment qui m’a procuré le plus d’émotion. Ce sacre était à la hauteur de l’attente du public, dans une salle archi-comble et dans une ambiance de folie lors de la finale à Bercy. Philippe Ventadour, le directeur du P.O.P.B. m’a ensuite confié que le bruit fait par les spectateurs avait dépassé les 119 décibels, un record. Le public a joué un rôle très important : quand les Suédois sont passés devant, il ne nous a pas lâchés. Pendant cette compétition, les Costauds ont remplacé les Barjots. C’est Anouk Corge, la journaliste de l’Équipe, qui, avec Philippe Gardent, était responsable de l’appellation les Barjots, et qui s’arrogeait de trouver un autre surnom.
C’était mon dernier match, à la tête des Bleus, cela ajoutait encore de l’importance pour moi à cette finale qui marque une nouvelle ère. J’allais me retirer et avant l’arrivée de Claude Onesta, beaucoup de gens se posaient des questions, comme on s’en est posé sur Didier Dinart et comme on s’en pose aujourd’hui sur Guillaume Gille.
Cette génération arrivait aux affaires et était pleine d’envie avec des jeunes joueurs, je pense notamment à Daniel Narcisse qui mettait le nez à la fenêtre. Lorsque je suis parti, j’ai eu la sensation du devoir accompli et de laisser un cadeau empoisonné à mon successeur. Mais d’un autre côté, le boulot était fait.

Mais pourquoi avoir décidé de boucler ta carrière à la tête des Bleus sur cette échéance ?
Cela ne se passe pas bien aux J.O. de Sydney. Le 2 octobre 2000, l’Équipe titre : « Un vent de fronde » qui me concernait et me décrivait comme un entraîneur autoritaire et des joueurs qui avaient du mal à exprimer des sentiments au retour de Sydney. J’ai réfléchi et j’ai pris la décision, de me retirer, à l’issue du Mondial 2001. Mais il n’était pas question de laisser tomber l’équipe de France à trois mois de l’échéance d’autant que j’avais contribué à ce que la France soit choisie pour accueillir ce Mondial.
Lorsque tu sais que c’est ta dernière, tu n’as pas envie de la rater, surtout sur un Mondial en France. Alors j’ai dit aux joueurs : « Je suis là pour vous aider à décrocher ce que nous n’avons pas obtenu à Sydney, pour diverses raisons. J’en assume une part mais pas l’intégralité. Je reste à votre soutien et à votre disposition pour tout. Mais ne comptez pas sur moi pour essayer d’avoir l’idée géniale pour battre l’adversaire. » J’ai mis en place, une autre sorte de leadership, je ne décidais plus de tout, je n’étais plus le coach omnipotent.

Concrètement, comment ce changement de gouvernance s’est-il opéré ?
Par des séances plénières où chacun était amené à prendre la parole. Petit à petit, cela a permis de gommer des réticences. Auparavant, la désignation du capitanat me revenait. Alors j’ai proposé aux joueurs de désigner le capitaine et de voter. Jackson Richardson, un immense joueur et un talent fou, avait montré des limites dans le capitanat. À la surprise générale, c’est encore Jack qui sort du chapeau alors que je pensais qu’un garçon comme Bruno Martini l’obtiendrait. J’ai mis en place ce que faisait déjà les Danois : confier des responsabilités à quelques joueurs du collectif, à des garçons comme Martini, Golic, Puigségur qui avaient un rôle élargi. Les problèmes étaient évoqués collectivement et cela a donné d’excellents résultats. J’avais introduit la gestion très participative, ce que Claude Onesta s’est enorgueilli de faire quelques années plus tard.

Propos recueillis par Hubert Guériau